Eviter de prêcher dans un (futur) désert

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(source: Convention internationale sur la diversité biologique)

Ministre suisse de l’environnement, Moritz Leuenberger a publié ce jour le message ci-dessous et qui mérite d’être diffusé, je crois, largement. Je tiens par là à exprimer mon fort soutien à la stratégie nationale de la biodiversité que le Conseil fédéral se promet de préparer et dont j’espère qu’il aura l’ambition que réclame la situation constatée aujourd’hui, après tant d’années durant lesquelles nous avons mis la tête dans le sable du désert…

Berne, 21.05.2010 – Message du Conseiller fédéral Moritz Leuenberger à l’occasion de la journée internationale de la biodiversité du 22 mai 2010


L’ONU a décrété que 2010 serait l’Année internationale de la biodiversité. Plus décidée que jamais, elle entend agir contre le recul de la diversité biologique et obliger ses Etats membres à intervenir de manière concrète lors d’une conférence qui les réunira à l’automne au Japon. À l’occasion de la journée internationale de la biodiversité, rappelons-nous à quel point cette thématique est vitale.


Par biodiversité, nous entendons la grande variété d’espèces, de gènes et d’écosystèmes. Cette variété est essentielle à la vie sur notre planète et au bien-être de ses habitants. Elle est le fondement même de notre existence.


La biodiversité est une infrastructure vitale:

  • Car sans elle, il n’y aurait ni pommes de terre, ni céréales, ni lait.
  • Sans les abeilles qui pollinisent les arbres fruitiers, il n’y aurait pas de fruits.
  • Sans une nature variée et intacte, rares seraient les touristes à visiter la Suisse.
  • Sans les génomes des espèces animales et végétales, bon nombre de médicaments n’existeraient pas. Savez-vous que l’aspirine fait appel à un principe actif du saule et que le Tamiflu est produit à partir d’une variété d’anis asiatique?
  • En cas de précipitations extrêmes, les sols intacts sont en mesure d’absorber une grande partie de l’eau, réduisant ainsi les risques d’inondation; ils filtrent l’eau de pluie et la rendent potable.
  • De même, des forêts résistantes protègent contre les avalanches et les glissements de terrain tout en stockant du CO2.

Pourtant, ces arguments d’ordre utilitaire et rationnel n’ont pas encore eu d’effet. Au contraire, nous exploitons la biodiversité jusqu’à la faire dispar tre. Nous avons saccagé des paysages, les avons réduits à l’état de désert et surexploités. Les zones humides et les prairies sèches ont presque entièrement disparu. Les cours d’eau ont été canalisés. Les conséquences en sont de lourdes pertes en matière de diversité biologique, que nous devons et voulons maintenant compenser. Certes, des progrès ont déjà été réalisés. Nous avons créé de nombreuses zones où la chasse est interdite et dans lesquelles le gibier peut se reproduire durablement. Depuis l’acceptation de l’initiative dite de Rothenthurm en 1987, nous ne touchons plus aux sites marécageux et à l’avenir nous protégerons mieux les prairies sèches.


Mais je l’admets, ces efforts ne suffisent pas. Certes, la Suisse fait figure d’élève modèle pour sa politique durable des transports: en revanche, en matière de biodiversité, il n’y a pas de quoi pavoiser. Notre négligence dans ce domaine a du reste été expressément pointée du doigt par l’OCDE. Il nous faut réparer les dég ts. Nous élaborons une stratégie nationale de la biodiversité, conforme à la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique. Le Conseil fédéral a fixé l’an passé les principaux jalons. Les mesures concrètes devraient suivre après l’été. Il s’agira par exemple de réserver suffisamment de surfaces pour conserver et développer la biodiversité. Nous entendons reconn tre la valeur économique des écosystèmes et proposer, lorsque cela s’avère nécessaire, des indemnisations. Les paysans doivent être mieux indemnisés au titre des compensations écologiques, des paysages ouverts ou des vergers à haute tige. En résumé, davantage que la simple protection de quelques espèces et biotopes, nous voulons encourager la variété dans les zones urbaines et rurales et faire ainsi de la Suisse un pays plus coloré, plus varié et plus riche.


En tant que pays disposant des meilleures infrastructures de transports de la planète, nous avons de bonnes raisons d’investir aussi davantage dans l’infrastructure qu’est la biodiversité.

En tant que chef du Département vaudois des infrastructures, j’apprécie naturellement ce rapprochement avec la biodiversité. Ce qui ne veut pas dire pour autant que des efforts ne doivent pas être consentis pour développer encore l’offre en transports publics. C’est même une mesure importante pour la protection de la biodiversité. CQFD.

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