Les préoccupations du Groupe Mobilité Chablais ne datent pas d’aujourd’hui. En effet, le Journal de Bex du 12 juillet 1949 titrait déjà, à propos d’une liaison ferroviaire entre les deux rives du Rhône :
« Un problème d’actualité. BEX-MONTHEY ou AIGLE-OLLON-MONTHEY ? ».

Journal de Bex – 12 juillet 1949
A relire cet article, on se dit que rien n’a vraiment évolué depuis. Ce projet de liaison ferroviaire entre Bex et Monthey répondait pourtant à la motion déposée à l’époque par le socialiste Charles Sollberger, dont voici la teneur :
Séance du Grand Conseil du Canton de Vaud – 29 mai 1945 :
« Les députés soussignés invitent, par voie de motion, le Conseil d’État à présenter au Grand Conseil, en plein accord avec les autorités fédérales et les compagnies intéressées, un projet de réorganisation des chemins de fer secondaires de la plaine du Rhône adapté aux circonstances actuelles et au perspectives d’avenir. »
Séance du Grand Conseil du Canton de Vaud – 30 mai 1945 :
« Développement de la motion Sollberger et consorts invitant le Conseil d’État à présenter au Grand Conseil un projet de réorganisation des chemins de fer secondaires de la plaine du Rhône.
M. Charles Sollberger : – Le but de la motion que j’ai l’honneur de vous présenter est de susciter une émulation créatrice au sein des compagnies de chemins de fer de la vallée du Rhône, créatrice en ce sens que le problème doit être envisagé à la lumière des conditions actuelles de la technique, de la modernisation des transports et de la rentabilité de toute entreprise qui se respecte.
Si, dans notre motion nous faisons appel à l’État, c’est que nous pensons que le rôle de celui-ci est de provoquer cette émulation et d’envisager l’avenir sous tous les angles, fussent-ils douloureux pour certains. C’est à cet esprit supérieur de l’État que nous faisons appel, à cette puissance créatrice d’œuvres durables et profitables à la communauté. L’État, devant la carence de certains faits matériels constatés, se doit d’agir en souverain ; il doit provoquer la coalition de certains intérêts qui, de prime abord, paraissent divergents, mais qui peuvent être amalgamés.
Nous pensons, quant à nous, que les conditions requises par l’état de fait décrit plus haut sont remplies dans le cas qu nous occupe. C’est ce qui nous conduit à déposer notre motion, laquelle n’a qu’un but : permettre un regroupement des forces dans l’intérêt du pays, mais à la petite mesure, si je puis m’exprimer ainsi.
Chacun, de l’ouvrier au paysan, du commerçant au banquier, sait que l’union fait la force. Pour opérer ce regroupement, cette uniformisation dans le matériel et la technique, œuvre de longue haleine, nous le savons, pour détruire de vieilles habitudes que l’on juge excellentes dans son milieu personnel, il faut que les autorités responsables du pays, de la Confédération à la commune, interviennent et demandent aux compagnies intéressées qu’elles étudient le problème de leur regroupement en un organisme financier, technique et commercial unifié, car nous sommes persuadés que les compagnies de chemins de fer de la plaine du Rhône seront, à l’avenir comme dans le passé, dans l’obligation de solliciter des subventions. Cette opinion est partagée également par les personnalités responsables et au courant de la situation des entreprises en question. Et la population de notre région partage ce point de vue.
Or, croyez-vous que le peuple acceptera à la longue ces continuels appels à l’aide de la part d’entreprises de transports qui ne tenteraient rien elles-mêmes pour améliorer leur situation ? Nous ne le pensons pas. Et ce n’est pas en restreignant la liberté du trafic automobile que vous vous attireriez les sympathies de la population. Non, la solution n’est pas là. Ce qu’il faut c’est un examen approfondi de la situation actuelle de ces entreprises, du double point de vue technique et industriel, afin de l’adapter au trafic de demain. Il importe de supprimer ce qui doit être enlevé et de créer ce qui doit être fait. Un service de transports automobiles dans la plaine du Rhône, large de 6 à 10 kilomètres, donnerait satisfaction à la population de cette région et améliorerait certainement la situation financière de ces différentes sociétés fusionnées. Si le Département fédéral des postes et des chemins de fer, l ‘État de Vaud, les communes et les entreprises intéressées comprennent que l’intérêt général exige la mise ne pratique des principes généraux qui doivent être à la base de toute exploitation moderne, quelle que soit soit importance, ce sera un bien pour le pays.
Tout en reconnaissant les immenses services que rendent ces compagnies de chemins de fer, tout en louant le travail de leurs chefs et de leur personnel et comprenant leur position d’auto-défense, nous pensons qu’elles se rendront compte que certaines conceptions dans l’exploitation d’une entreprise sont aujourd’hui périmées en regard des immenses progrès de la technique moderne et de la concurrence ; ces conceptions doivent être d’autant plus révisées que lorsqu’une entreprise de transport bat de l’aile, elle s’adresse à l’État-infirmier, décrié si souvent mais grand dispensateur de cette manne si convoitée, n’est-il vrai ? que l’on nomme argent.
Il n’est nullement question de prévoir l’étatisation de ces entreprises ou leur remise à une société fermière d’exploitation. Non, nous demandons que l’État, ayant adopté la motion que j’ai l’honneur de vous présenter, fasse naître un mouvement d’études et de rationalisation nécessaire à ces entreprises en les invitant à étudier les perspectives d’avenir, à se montrer audacieuses et clairvoyantes, à faire fi des situations acquises et de certains privilèges qui n’ennoblissent jamais ceux qui en bénéficient.
Nous estimons qu’un réorganisation générale des entreprises de la plaine du Rhône est nécessaire et urgente. Si nous donnons suite à ces suggestions avec la hauteur de vues qui s’impose, nous aurons travaillé pour le bien général de notre canton. Si le Grand Conseil veut bien étudier attentivement la présente motion, il fera œuvre utile et constructive. C’est ce qui nous souhaitons.
Cette motion est renvoyée à l’examen d’une commission que le Bureau nommera et dont le motionnaire fera partie de droit. »

Charles Sollberger. Député au Grand Conseil vaudois, syndic de Bex, Conseiller national, puis Conseiller d’État

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Un demi-siècle plus tard, Georges Mariétan et Roland Ribi présentaient l’avancement de la « vaste étude sur la situation des transports publics dans le Chablais » dans Le Nouvelliste du 9 octobre 2002… Douze ans après, les même questions demeurent !

Le grand défi est toujours d’actualité
Il est donc grand temps de réparer cette erreur de l’histoire et de bâtir le « Pont de la prospérité commune » !