Priorité aux capteurs solaires thermiques dans les sites protégés

Installation PV EPFL Solstis

(source: http://www.solstis.ch, installation photovoltaïque sur les toits de l’EPFL)

La décision courageuse du Conseil fédéral de sortir du nucléaire a encore accru la tension et les antagonismes entre la promotion des nouvelles énergies renouvelables et la protection du patrimoine b ti. Le département des infrastructures étant en charge des monuments historiques, j’ai donc décidé de faire évoluer les critères d’appréciation des projets en les clarifiant. Mes propositions, relayées par les médias, n’ont pas toujours été bien comprises. Cet article vise à apporter les précisions utiles.

A mon sens, la protection du patrimoine et de notre environnement b ti relève du volet social et culturel du développement durable. Il n’est dès lors pas possible de sacrifier cette richesse commune sur l’autel des énergies renouvelables. Cependant, si le patrimoine b ti ne peut pas s’adapter aux nouveaux défis énergétiques, il risque fort d’être déserté et de se dégrader faute d’investissements d’entretien, ce qui, à certains égards, serait encore pire.

Il faut aussi admettre que l’installation de capteurs solaires sur un toit est une opération réversible, contrairement, par exemple, au remplacement d’un plancher ancien par une dalle en béton. Le jour où, par hypothèse, on trouverait une source d’énergie abondante, bon marché et non polluante, on pourrait aisément remettre des lattes et des tuiles pour restituer l’esthétique originale.

Sur la base de ces deux constats, je propose donc de libéraliser l’installation de capteurs solaires dans le périmètre des sites inscrits à l’inventaire ISOS, tout en fournissant les conseils et diffusant les meilleures pratiques pour garantir une bonne intégration architecturale.

Mais il convient d’établir une différence entre les capteurs thermiques pour la production d’eau chaude et les panneaux photovoltaïques. Les premiers doivent être aussi près que possible du lieu de consommation de l’eau chaude, alors que les seconds, dont le courant est en général injecté dans le réseau électrique, peuvent être installés n’importe où.

Comme les Chambres fédérales l’ont voulu, les installations photovoltaïques bénéficiant de la rétribution à prix coûtant (RPC) sont toutes de grandes taille pour la simple et bonne raison qu’elles fournissent un courant à prix abordable. La plupart se situent en outre sur des toits plats, en dehors des centres historiques et n’ont que peu d’impact sur l’environnement construit. L’orientation et l’inclinaison des panneaux peuvent en effet y être optimisés et les systèmes d’injection du courant, plus grands, sont aussi plus performants. Sachant qu’il reste en Suisse des dizaines de kilomètres carrés de toitures industrielles permettant d’accueillir des installations photovoltaïques susceptibles de bénéficier d’un financement par la RPC, il est parfaitement justifié de renoncer pour le moment à implanter de petites centrales de ce type sur des monuments historiques.

Le propriétaire qui en a les moyens et qui tient à apporter sa contribution à un avenir énergétique durable peut parfaitement le faire en investissant directement dans un projet photovoltaïque “industriel” et efficace, ou en optant pour du courant “vert” auprès de son fournisseur d’électricité, lequel devra ensuite construire des installations pour fournir le courant demandé par le marché. Par exemple, la Romande Energie vend des “carrés solaires” sur la plus grande centrale de Suisse en cours de construction sur les toits de l’EPFL (voir http://www.moncarresolaire.ch/). Pour ma part, j’ai investi dans la société suisse Edisun Power qui construit en Suisse et ailleurs en Europe des installations photovoltaïques en partenariat avec des distributeurs d’électricité. Mon intention n’est certainement pas de freiner le développement rapide et important du photovoltaïque, c’est tout le contraire!

2 réflexions au sujet de « Priorité aux capteurs solaires thermiques dans les sites protégés »

  1. Ces propos sont moins catastrophiques que ceux rapportés (déformés? dans ce cas un rectificatif serait le bienvenu) par 24 Heures. Mais ils ne tiennent pas compte de plusieurs aspects:
    1) De très nombreuses installations bénéficiant du RPC sont de taille importante, mais cela va changer, car les critères sont : date du dépôt de la demande et, pour une même date, économicité selon les critères officiels. Des milliers de petites installations attendent de bénéficier du RPC ces prochaines années, mais il est évident que l’immense majorité de celles-ci ne sont pas dans un site ISOS
    2) Le soleil brille partout, c’est une énergie diffuse, il est intéressant de la produire et utiliser localement, sans pertes de transport et de transformation. Cette préférence donnée à  de grandes installations relève d’une vision technocratique, étonnante de la part d’un écologiste.

  2. Je suis rassuré d’apprendre que l’immense majorité des petites installations ne sont pas dans un site ISOS. De même, l’application du principe “first in – first out” pour les projets susceptibles de bénéficier de la RPC est une bonne nouvelle: cela redonne une chance au dossier déposé par La Bonne Combine sur son toit plat à  Prilly…
    Contrairement à  ce qui peut se concevoir sur les monuments historiques, les toits plats permettent de maximiser le rendement en ajustant l’orientation et l’inclinaison des panneaux. Les pertes de transport sont minimisées lorsque les installations se situent dans les zones de consommation, soit dans les zones urbanisées, là  où se trouvent les toits plats. Quant aux pertes de transformation, m’est avis qu’elles se réduisent avec la taille de l’installation (jusqu’à  un certain point).
    Je suis étonné que ces principes économiques élémentaires échappent à  un physicien vert.
    Encore une fois, j’entrerai en matière sur l’installation de panneaux photovoltaïques sur des monuments historiques le jours où toutes les autres possibilités auront été exploitées. Et j’entends libéraliser le plus largement possible les capteurs thermiques pour produire l’eau chaude consommée sur place.

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