Utilisation plus efficace du réseau autoroutier

RN Ouest lausannois

Quatre ans de travail et d’études pour convaincre l’Office fédéral des routes (OFROU) de l’utilité de créer une nouvelle jonction autoroutière à Ecublens. L’annonce du lancement d’un projet général faite jeudi 28.01.10 en compagnie du directeur de l’OFROU, Ruedi Dieterle, est une excellente nouvelle pour le développement durable du canton de Vaud et du projet d’agglomération Lausanne-Morges (PALM). L’économie, l’environnement et la société devraient en tirer bénéfice. A elles seules, les centrales de distribution Migros (Ecublens) et Coop (Aclens) estiment qu’elles vont réduire de 10% (500 tonnes par an) leurs émissions de CO2 et chaque employé devrait gagner 30 minutes par jour, matin et soir, en évitant d’aller “chercher” l’autoroute jusqu’à la jonction de Crissier à partir du secteur d’Ecublens sur un tronçon de route cantonale (RC) complètement saturé. Les polluants atmosphériques et le bruit devraient être substanciellement réduits dans un secteur (en vert sur l’image) qui affiche d’importants dépassement des normes légales. Ce faisant, il devient possible de développer l’offre en transports publics sur le réseau des routes cantonales pour desservir les importants pôles de développement de l’Ouest lausannois. Voir le communiqué de presse du Conseil d’Etat du 28.01.10 (pdf, 34,8 Ko).

Lors de la conférence de presse, certains journalistes se sont étonnés qu’un écologiste comme moi défende un projet autoroutier. Il ne s’agit pas de “fine stratégie” (pour reprendre les termes de l’éditorial de 24 Heures du 29.01.10) visant à rabibocher les écolos avec les milieux économiques, mais bien d’un projet qui s’inscrit pleinement dans la stratégie de développement durable du canton de Vaud. Explications.

Le mitage du territoire constitue probablement le principal défi pour ce canton. Je rappelle que, sur 4 nouveaux habitants, 3 s’installent en dehors des centres, ce qui explique une expansion du trafic motorisé bien supérieure à l’évolution démographique et à la croissance économique. Pour contrer cette tendance, le Plan directeur cantonal prévoit de “construire la ville en ville”. Ainsi, le PALM devrait accueillir, d’ici 2020, 70’000 nouveaux habitants et emplois (par rapport à 2005), principalement dans l’Ouest lausannois. Un tel projet se heurte à la loi sur la protection de l’environnement dans la mesure où tout développement peut être condamné comme une nouvelle source de nuisance (pollution, bruit). C’est pourquoi les planifications régionales doivent prévoir un développement qui s’appuie essentiellement sur les transports publics et les mobilités douces. C’est vite dit, mais pas facile à faire!

Le schéma directeur de l’Ouest lausannois (SDOL) prévoit que l’on multiplie par 2,5 (!) l’offre en transports publics dans la région, d’ici 2014. Malheureusement, les Transports publics lausannois (tl) ne peuvent tout simplement pas mettre en place de nouvelles lignes sur des tronçons routiers totalement saturés à l’heure de pointe. En effet, à quoi bon prendre un bus si vous ratez systématiquement votre train? Il se trouve que les principaux projets de développement des transports publics concernent des trams et des bus circulant sur la route du Lac (RC 1), la route de Chavannes (RC 74) et la route Ecublens-Crisser (RC 179 et 151). La création simultanée des nouvelles jonctions d’Ecublens et de Chavannes, ainsi que le complément prévu à la jonction de Malley, vont réduire de 15% à 25% le trafic individuel motorisé sur ces axes routiers locaux et conditionnent une offre performante et attractive en transports publics.

Durant plusieurs années, l’OFROU s’est opposé à créer de nouvelles entrées sur l’autoroute. On le comprend d’autant mieux que le trafic est d’ores et déjà saturé, la Confédération souhaitant réserver un maximum de capacité au trafic de transit à longue distance. Force est de constater que, aujourd’hui déjà, c’est le trafic d’agglomération qui est responsable de la congestion des routes nationales. Par exemple, on compte environ 65’000 véhicules par jour entre Nyon et Morges (ce qui est lourd pour une autoroute de 2 x 2 pistes, mais tolérable), alors que cette valeur passe à 85’000 entre Morges et Ecublens, pour atteindre près de 100’000 véhicules entre Ecublens et Crissier (goulet d’étranglement de Crissier). Ce sont donc bien ces quelque 30’000 véhicules effectuant des trajets locaux qui peuvent être considérés comme responsables des bouchons. C’est pourquoi le Conseil d’Etat mise tant sur le développement des transports publics, à commencer par le développement de l’infrastructure CFF en direction de Genève et d’Yverdon pour améliorer la desserte RER et grandes lignes (cf. accord Vaud-Genève). Paradoxalement, le développement de l’offre en transports publics urbains est une exigence de l’OFROU pour garantir que ces nouvelles jonctions autoroutières ne conduisent pas à une augmentation rapide du trafic individuel motorisé.

Reste un problème: la nouvelle jonction d’Ecublens se situe dans le périmètre de protection de la Venoge. Et là, les écologistes devront faire preuve d’une certaine hauteur de vue pour accepter (moyennant des mesures de compensation adéquates) la réalisation de ce projet, en considérant les bénéfices mentionnés ci-dessus et qui concernent bien plus que les abords de notre belle Venoge. Le communiqué publié peu après ma conférence de presse par l’Association Venoge Vivante (AVV) semble indiquer qu’une entrée en matière est possible du côté des défenseurs de l’environnement. (voir le communiqué de presse AVV du 28.01.10)

Enfin, je tiens encore à évoquer un autre objet de satisfaction qui tient aussi de l’amélioration de l’efficacité des infrastructures existantes: la télégestion du trafic et l’utilisation de la bande d’arrêt d’urgence (BAU) entre Morges et Ecublens. Dix jours après sa mise en service, cette idée novatrice – que j’ai fortement soutenue depuis 2005 – semble tenir toutes ses promesses. Alors que d’importants ralentissements (augmentation des temps de parcours de 5-15 minutes sur ce tronçon) étaient quotidiennement enregistrés matin et soir durant deux heures, la vitesse moyenne s’établit aujourd’hui à 90 km/h, ce qui ramène à zéro la perte de temps sur ce parcours. Là aussi, les trois dimensions du développement durables sont favorablement influencées, tout cela pour un investissement public limité (CHF 35 mios, contre CHF 2’800 mios pour le grand contournement de Morges) et quelques dizaines de mètres carrés bétonnés: moindre impact économique, diminution de la pollution, des émissions de CO2 et du bruit, réduction notable des accidents (0,7/semaine contre 1,4 en moyenne de 2005 à 2008). Ne reste plus qu’à éviter un éventuel “appel d’air” qui conduirait à accroître le trafic jusqu’à une nouvelle saturation. Je m’engage à surveiller ce point de très près et sur la durée, en misant sur le report modal “de la route au rail” que devraient permettre les importants projets inscrits au programme de législature du Conseil d’Etat.

5 réflexions au sujet de « Utilisation plus efficace du réseau autoroutier »

  1. Je me demandais pourquoi nous n’aiderions pas les Sarkosiens, pays voisin à  construire leur autoroute Genève Evian st gyngolf Aigles http://www.siac-chablais.fr/desenclavement.html . Ce qui déchargerait le côté nord du lac sur tous les points chauds. De plus notre argent serait investi dans une autoroute à  péage et pourrait être rentable.

  2. Je ne manquerai pas de relayer cette proposition à  la prochaine occasion. Par exemple en marge d’un concert de Carla Bruni à  Lausanne…

    PS: Un grand merci pour la bouteille que tu m’as fait parvenir à  l’occasion de mon 50e anniversaire! Amitiés.

  3. Si j’en crois votre article, la construction de la route prévue pour les camions qui partent de la zone industrielle d’Aclens devient inutile?
    En effet, cette nouvelle infrastructure permettrait de régler le problème de la circulation des camions de la Coop et autres Denner entre la zone industrielle Aclens/Vufflens-la-Ville et l’autoroute et ainsi rendre inutile la construction de la route.
    L’idée de la création de cette route est tout sauf rationnelle et écologique, d’ailleurs sa construction est stoppée par des oppositions d’organisations écologiques.
    Il y aurait encore une autre solution, un peu plus compliquée : mettre la marchandise sur le train, puisqu’une ligne jouxte le site, l’amener à  la gare de triage de Denges et ensuite la transborder sur des camions qui rejoindraient l’autoroute par la nouvelle entrée d’Ecublens.

  4. Inutile est un bien grand mot, sachant qu’un tiers environ des véhicules circulent à  destination ou en provenance du Nord (Yverdon-les-Bains, Berne, Valais). Cela dit, vous tenez le même raisonnement que l’Association Venoge Vivante qui a publié un communiqué de presse (voir lien inclus dans mon article) pour se déclarer prête à  accepter la nouvelle jonction (entrées + sorties) si l’on renonçait à  réaliser la RC 177.

    Selon mes informations, la majeure partie des marchandises qui parviennent dans les centres logistiques de la zone industrielle de Vufflens / Aclens est acheminée par le rail. Les produits conditionnés destinés à  la distribution “fine” ne se prêtent guère au transport ferroviaire de masse. Ainsi, l’idée de recourir au rail entre Aclens et Denges se heurterait probablement à  des considérations économiques.

    Il va sans dire que ce sont les tribunaux (voire éventuellement le Peuple) qui auront, bien sûr, le dernier mot…

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