Club de Rome: 40 ans de prêche dans le désert

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En 1972, le Club de Rome avait publié “Halte à la croissance?” (édition française en 1973) qui démontrait que la croissance exponentielle (en accélération constante) n’est pas tenable dans un monde fini. Cet ouvrage, lu alors que j’avais 18 ans, m’a profondément marqué et a sans doute orienté ma vie dans le sens du développement durable. Aujourd’hui, l’Office fédéral de l’environnement donne à nouveau la parole à ces empêcheurs de développer en rond dans une interview du président Martin Lees publiée dans la revue “Environnement” (voir Environnement 1/09, pdf 4,8 Mb).

“L’humanité vit au-dessus de ses moyens écologiques depuis 1980 déjà, époque à laquelle nous avons dépassé la limite de la durabilité. L’usage que nous faisons actuellement des ressources finies et renouvelables se fait aux dépens des générations futures.” A l’heure des plans de relance et autres green new deals, il est intéressant de noter que les ressources renouvelables font partie des ressources surexploitées. “75% des populations de poissons marins sont victimes de surpêche, 40% des sols cultivés sont dans un état déplorable, les forêts diminuent sans cesse, de même que les eaux souterraines de nombreuses régions”, précise Martin Lees. Pour opérer le changement de cap qui s’impose, il faut donc non seulement tendre à se passer des énergies fossiles, mais il faut réduire notre consommation de ressources renouvelables. Ce qui signifie, par exemple, que les agrocarburants représentent une voie sans issue.

Martin Lees affirme que “la notion de croissance telle qu’elle se reflète dans le produit national brut doit être entièrement revue”. Il faudrait notamment “internaliser les coûts externes que représentent les atteintes à l’environnement”, ce qui signifie que les pouvoirs publics doivent fixer un prix pour les ressources environnementales qui soit ensuite intégré au prix des biens et services commercialisés. Pour ce faire, ils doivent engager une réforme fiscale écologique, autrement dit un déplacement sensible de la fiscalité du revenu vers les ressources d’environnement.

Malheureusement, cette idée se heurte à une opposition farouche de la gauche traditionnelle. Tout récemment, le groupe socialiste du Grand Conseil a, pour la énième fois, fait capoter l’inscription du principe “pollueur-payeur” dans la loi vaudoise sur les déchets, malgré les aménagements”sociaux” proposés par les Verts.

On pourrait considérer qu’il s’agit là d’une vieille pomme de discorde entre socialistes et verts. Je crains cependant que la divergence ne soit plus profonde. Malgré un discours “anti-capitaliste”, le modèle de la croissance continue (du pouvoir d’achat, du rendement des placements des caisses de pension, etc.) est largement soutenu par la gauche, ici comme ailleurs. Inutile de préciser que le “changement de paradigme” auquel le Club de Rome appelle depuis 40 ans compte fort peu d’émules à droite. C’est dire si le changement de cap n’a que peu de chance de se produire avant que l’humanité ne soit “dans le mur”.

Exercé à lutter contre des moulins, je continuerai à expliquer et à convaincre, en avançant les petits pions du développement durable sur l’échiquier du XXIe siècle…

3 réflexions au sujet de « Club de Rome: 40 ans de prêche dans le désert »

  1. Je pense qu’il serait temps de mettre concrètement en pratique la plus qu’excellente idée de non-croissance prônée par le Club de Rome, Monsieur Marthaler, vous qui êtes le chef entre autre des routes nationales vaudoises en vous préoccupant de l’inquiétant fait que le canton de Vaud est, je crois, l’unique canton de Suisse où ce sont les communes qui assument les frais d’entretien des routes de leur commune. Pensez à  toutes les opérations
    de replantage de haies vives, de bocages et autres actions liées à  l’environement que nos communes pourraient (d’autant plus) financer sans ce fardeau. A bon entendeur !

  2. Il me faut préciser les choses. Les routes communales sont partout sous la responsabilité et à  la charge des communes. Parfois, elles touchent des subventions et/ou parts de la RPLP ou de la taxe sur les huiles minérales attribuées au canton. La particularité vaudoise consiste à  ce qu’une route cantonale en traversée de localité (zone urbanisée) est à  la charge de la commune et que, depuis 2003, le canton a décrété un moratoire sur les subventions qu’il aurait la possibilité de verser. J’ai tenté de changer tout cela en 2004 pour faire en sorte qu’une route cantonale le soit de bout en bout, mais le Grand Conseil l’a refusé (pour des raisons qu’il serait trop long d’exposer ici).

    Ceci dit, si une nouvelle répartition des charges était entreprise dans ce domaine, elle serait probablement “à  somme nulle” et le canton aurait tout simplement moins de moyens à  engager dans le replantage de haies vives, de bocages et autres actions liées à  l’environnement…

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