Confession d’une bidasse

C’est pas facile, mais aujourd’hui je dois faire mon coming-out. Dans le milieu politique que je fréquente, je le clamais pas sur les toits, de peur de n’être pas compris, de passer pour différent. En effet, il n’est pas toujours aisé d’avoir une particularité que son entourage ne partage pas. Mais parfois le moment vient où vous n’avez plus envie de vous cacher ou vous avez envie de crier au monde la vérité trop longtemps dissimulée.

soldatAinsi ce jour est aujourd’hui venu : Amis vert-e-s, je l’avoue, j’ai fait mon service militaire.

Oui, j’ai appris à tirer sur des cibles qui ressemblent vaguement à des humains, oui, je suis rentré à la caserne en essayant de dissimuler une trop forte odeur de bière au caporal de garde, oui, j’ai balancé une grenade avec la peur au ventre, oui, j’ai des histoires de col de montagne en tenu AC, de cordes coupées en deux pour faire le bon nombre à l’arsenal, de tablettes de chocolat planquées pendant la semaine de survie, de nuits entières d’exercice, d’ordres, de contre-ordres et de contre-contre-ordres, de chanson viriles où il est question de fierté et de fusils, de restes de munitions balancées dans la forêt, de nourriture plus que douteuse et d’innombrables parties de jass.

Bref, comme tous les anciens soldats, j’ai moi aussi tout ce qu’il faut pour ennuyer prodigieusement mon épouse pendant des soirées entières… mais heureusement, je n’ai pas d’épouse.

Et amis vert-e-s, je dois vous faire un deuxième aveux : je le referais. Je m’engagerais à nouveau pour mon pays si j’avais la conviction que cet engagement est utile. En effet, je pense qu’un pays à le droit à se défendre contre l’extérieur. Mais voilà, l’armée et le Conseil fédéral s’obstinent à vouloir préparer la défense contre les troupes soviétiques, alors que le monde a changé. Les principales menaces contre notre pays sont des attaques terroristes (comme à New York, Londres ou Madrid) ou des cyberattaques (comme en Estonie ou en Géorgie) et contre ces menaces, nos chars de grenadiers, nos Cv-9030, nos Piranha 6×6, nos Leopard 2 et même nos FASS 90 ne sont pas d’un grand secours.

Face aux menaces actuelles, il nous faut des pros. Des gens qui connaissent leur métier et non de pauvres types qu’on prend chaque année pour faire des tours dans la campagne bernoise pendant deux semaines. Pour défendre mon pays, j’échangerais donc sans remords 20’000 fantassins de milices contre 50 informaticiens professionnels formés à la guerre électronique et 20’000 grenadiers de chars contre 50 agents de renseignements professionnels.

Amis vert-e-s, vous qui avez presque tous été objecteurs de conscience et qui avez, pour les plus vieux d’entre vous, même connu la prison pour cette raison, ne m’en voulez pas trop. Car mon militarisme et ma volonté de défendre mon pays me poussera à faire comme vous : voter oui à l’initiative pour l’abrogation du service obligatoire.

Une réflexion au sujet de « Confession d’une bidasse »

  1. Cher Martial,
    Ainsi, nous avons voté pareillement, mais sans grand effet sur le cours de la politique de défense de notre pays. Je fait effectivement partie des Verts qui ont payé (7 mois fermes!) leur refus du modèle actuel (je devrais dire ancestral…). Et si c’était à refaire, je le referais!
    Mais ce message est surtout un prétexte pour te féliciter d’avoir créer ce blog (open source et soumis à aucune censure) et pour t’encourager à continuer à l’alimenter. Je continue à croire que des liens directs entre les élus et leurs électeurs sont indispensables à la vitalité de notre démocratie. C’est peut-être même un bon moyen de la “défendre”. Car les nouvelles technologies de l’information et de la communication ne doivent pas se résumer à ériger des pare-feu contre les cyber-attaques…
    Cordialement
    François

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