Plus qu’un fil à la patte

(source http://www.framablog.org/index.php/post/2012/07/25/odf-ooxml-europe-interoperabilite)

Je suis bien placé pour en témoigner, la volonté politique ne suffit pas à s’affranchir de la dépendance vis-à-vis des formats propriétaires! Ci-dessous, un constat affligeant fait par la Commission européenne…

Les administrations qui n’utilisent pas de standards ouverts travaillent contre celles qui le font

Issue d’un blog de la Commission européenne dédié à l’interopérabilité, la citation titre de ce billet révèle une fois de plus les difficultés que rencontrent les institutions souhaitant migrer vers le Libre.

Trois exemples, en Allemagne, Hongrie et Belgique, témoignent malheureusement du blocage du processus dont la cause principale est à chercher dans l’adoption antérieure de la suite Microsoft Office et de ses formats fermés (ou faussement ouverts).

Et tout ceci pris sur les deniers publics…

La migration des institutions vers l’open source est entravée par des problèmes d’interopérabilité

Interoperability problems frustrate authorities’ move to open source

Gijs Hillenius – 20 juillet 2012 – Joinup (European Commission)
(Traduction Framalang : Poupoul2, Martin, Quentin)

Les dépendances aux logiciels propriétaires des gouvernements européens, nationaux et locaux continuent de freiner les municipalités qui essaient de se séparer des carcans de leurs éditeurs en passant à l’open source. On trouve des exemples récents dans les municipalités de Fribourg en Allemagne, de Miskolcs en Hongrie et de Schoten en Belgique.

Le principal problème dans ces trois municipalités est l’interopérabilité des documents. Ce qui est grave, c’est que cela a amené la ville allemande de Fribourg à reconsidérer son usage actuel de la suite bureautique open source LibreOffice. Elle est en train d’étudier le retour à l’omniprésente suite bureautique propriétaire. Un porte-parole de la ville a annoncé plus tôt dans la semaine qu’une étude des problèmes de la suite bureautique sera livrée au conseil municipal en septembre.

La dépendance aux formats de documents et aux suites bureautiques propriétaires de toutes les autres administrations publiques est également la cause de problèmes pour la ville de Miskolcs. La ville hongroise utilise OpenOffice, une alternative à LibreOffice. Dans une étude que Joinup publiera dans les tous prochains jours, les officiels de la ville disent que dans quelques cas, l’administration est contrainte de revenir à la suite propriétaire, pour s’assurer que les documents et les macros embarquées soient compatibles : « Nous aimerions pouvoir demander à nos partenaires d’arrêter de nous envoyer des documents contenant des macros. La leçon que nous avons apprise ici est que des facteurs externes rendent impossible la migration totale vers des logiciels open source. »

Le même problème freine la ville belge de Schoten, confirme Jan Verlinder, le chef du département informatique de la ville. « La majorité des administrations publiques prend la voie facile et continue d’utiliser et de mettre à jour ses logiciels propriétaires. Les responsables de ces organisations informatiques ne semblent pas se préoccuper du fait qu’il s’agit de décisions coûteuses. En plus des coûts immédiats, cela force également leurs organisations à payer pour les mises à jours suivantes ».

Cependant, les administrations publiques prennent progressivement conscience des coûts du verrouillage des éditeurs, selon Verlinden. « Nous sommes de plus en plus approchés par d’autres gouvernements qui veulent également utiliser de l’open source pour résoudre ce problème ».

Verlinden : « Mais en réalité, les administrations qui n’utilisent pas de standards ouverts travaillent contre celles qui le font. »

« Changer pour un format de document ne dépendant pas d’un seul éditeur serait un excellent premier pas. Ça ne réclame même pas beaucoup de modifications aux logiciels ». En 2006, le gouvernement fédéral belge a rendu obligatoire l’utilisation d’un tel format, l’Open Document Format pour les documents échangés entre les administrations publiques « En pratique, il est à peine utilisé », fait remarquer Verlinden.

Crédit photo : Vinoth Chandar (Creative Commons By)

Je ne peux que confirmer le problème posé par les macros, réalisées en Visual Basic, un langage de programmation propriétaire développé par l’éditeur propriétaire (voir http://www.01net.com/editorial/565061/le-grand-guide-de-libreoffice/).

Mais il y en a un autre: le format abusivement baptisé OpenXML par Microsoft.

Aujourd’hui encore s’affrontent deux formats documentaires XML : d’un côté OpenXML implémenté par Microsoft dans sa suite Office et de l’autre coté le format OpenDocument supporté en natif notamment par les suites bureautiques de l’écosystème “OpenOffice” : LibreOffice, Apache OpenOffice et Symphony.

La reconnaissance par l’ISO de ces formats ne règle pas un problème de fond, rencontré par les organisations ayant choisi de basculer vers les suites bureautiques Open Source : l’interopérabilité des formats documentaires, par les biais des filtres d’importation/exportation.

Cette interopérabilité étant aujourd’hui encore très perfectible, elle justifie parfois à elle seule l’abandon des choix bureautiques OpenSource : le canton de Soleure en Suisse, ou la ville britannique de Bristol ont ainsi rebasculé sur Office.

Conscient de ce problème, un groupe de travail de l’Open Source Business Alliance, appuyé par plusieurs villes allemandes et suisses (dont le canton de Vaud, sur demande insistante de ma part), ont démarré un chantier visant à améliorer la qualité  du filtre OpenXML d’OpenOffice et LibreOffice.

Des spécifications, publiées sous licence Apache 2.0 ont ainsi été soumises pour avis et commentaires au groupe Office Interoperability de l’Open Source Business Alliance. (voir http://blog.calipia.com/2012/02/16/interoperabilite-documentaire-entre-office-et-libreofficeapache-openoffice/)

En mai 2007, l’ISO avait validé un standard ouvert pour les fichiers texte, soit Open Document, le format utilisé par OpenOffice (aujourd’hui LibreOffice). C’était inacceptable pour Microsoft qui aurait dû se plier à cette nouvelle norme et qui aurait vu ses clients s’affranchir de leur dépendance… L’entreprise a donc cherché à imposer un autre standard (contradiction dans les termes!), ce qui lui a été refusé une première fois par la communauté internationale, en septembre 2007 (voir http://linuxfr.org/news/openxml-recalé-par-liso). Mais en mars 2008, Microsoft parvenait à ses fins en obtenant de l’ISO la reconnaissance du standard OOXML (voir http://www.zdnet.fr/actualites/l-iso-valide-la-normalisation-d-office-open-xml-39380095.htm). La France (AFNOR), qui avait voté contre ce deuxième standard en 2007, s’est finalement abstenue en 2008. “Le revirement français aurait été dicté de l’Elysée, par le conseiller de Nicolas Sarkozy spécialisé dans les nouvelles technologies.” (voir http://www.lemagit.fr/article/microsoft-openxml-bureautique-iso-openoffice/2092/1/l-etat-monde-microsoft-impose-forceps-son-format-openxml/)

Alors quand on lit que Microsoft ne respecte même pas le standard qu’il a réussi à imposer au monde entier et qu’il faut que les utilisateurs d’autres logiciels se cotisent pour éviter de retomber dans ses griffes, on se dit que cette histoire de “ouf” n’est pas encore terminée…

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