L’avènement préoccupant du gadget de pointe

L’ère du geste graphique semble s’achever, laissant place à celle, sournoise, de l’universalité sophistiquée. L’illectronisme devient blasphématoire.

Au sein des écoles pourtant, l’intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC) s’avère dans certains cas avantageuse, voire nécessaire. Le risque de dérives reste toutefois palpable. Un célèbre collège privé pulliéran en est le triste exemple : il a récemment distribué 689 iPad à ses élèves. Ubuesque démesure…

Jean-Luc Velay, chargé de recherche au CNRS, affirme, dans une interview accordée en octobre dernier à la revue pédagogique Educateur, que «tous les mouvements que nous produisons quand nous sommes enfants participent à notre développement psychomoteur», ou encore que «toute action s’accompagne de retours sensoriels provenant des différents capteurs de notre corps». En résumé, travailler manuellement favorise l’apprentissage. La perception est consubstantielle à l’action. Or l’utilisation effrénée de tablettes et autres claviers empêche le geste cursif, la correspondance entre le mouvement et le signe, compliquant ainsi, dans diverses situations, l’assimilation des enseignements par le sujet apprenant.

Enfin, l’exploitation abusive des TIC, onéreuse au demeurant, engendre un second problème de poids, puisqu’elle postule, de façon sous-jacente, l’obsolescence du professionnel de l’enseignement et l’indigence motivationnelle de l’étudiant. Le professeur, entité surannée, ne serait bon qu’à dispenser d’interminables homélies, plongeant ainsi ses élèves dans les affres de l’ennui. Incapable de susciter quelque curiosité que ce soit, le maitre devrait s’en remettre à la technologie toute-puissante, elle-seule apte à éveiller l’intérêt des externes. En outre, une telle vision prête à la structure scolaire un caractère supposément démoralisant. L’école conditionnerait négativement l’enthousiasme de ses pensionnaires.

Cependant, une fois “l’effet iPad” consommé, il y a fort à parier que la ferveur didactique des écoliers  s’estompera. Il faudra alors concevoir de nouveaux procédés, aussi factices qu’éphémères, susceptibles de provoquer de l’entrain. Le high-tech n’aura été qu’une vaine chimère.

À n’en pas douter, la motivation, si elle ne parait pas inhérente à la forme scolaire, résulte donc de l’activité proposée et, dans une moindre mesure, de la personnalité de l’enseignant. Ce dernier, par le contenu de ses cours et les tâches qu’il propose, doit favoriser la construction d’un rapport au savoir propice aux apprentissages. Faire accepter à l’élève d’apprendre, c’est édifier un zèle durable, authentique, au milieu d’un environnement stimulant. Et pour ce faire, nul besoin d’apparats technologiques.

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