En matière de mobilité, les solutions “hardware” font rêver. Et les solutions “software” aussi!

affiche congrès SATW 2008

Invité le 29 août 2008 à prononcer le discours d’ouverture du congrès de l’Académie suisse des sciences techniques, j’ai tenu à rappeler que la “voiture propre” est un rêve probablement inatteignable, alors que des solutions de gestion de la mobilité peuvent s’avérer très efficaces dès aujourd’hui. J’ai notamment cité l’exemple de la Fondation genevoise des services d’aide et de soins à domicile (FSASD) qui a mis en oeuvre un plan de mobilité d’entreprise lui permettant de réduire de plus de 60% (!) les déplacements motorisés de son personnel.

Elle a reçu en septembre 2006 le Prix de la mobilité d’entreprise pour ce qui a été mis en place dans l’un de ses centres genevois. Concrètement, les 40 voitures privées utilisées pour apporter des aides et des soins ont été remplacées par 4 véhicules Mobility, 20 vélos (dont 10 avec assistance électrique) et des abonnements pour les transports publics. Outre les bénéfices considérables pour l’environnement, cette réorganisation a apporté d’importants avantages pour la fondation (réduction des coûts de transport) et pour les collaboratrices et collaborateurs qui se déclarent moins stressés et en meilleure forme physique. Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est que les temps de parcours ont été notablement réduits (environ 30%) et cela au profit des bénéficiaires de soins à domicile! Pour plus de détails, voir l’exposé des lauréats (PDF, 800 kB).

Je ne veux pas que l’on renonce aux recherches dans le domaine des véhicules propres, mais je constate que les gains qu’il est possible d’en attendre sont relativement modestes. Ils sont même parfois contrecarrés par d’autres évolutions. C’est ainsi que les meilleures performances des moteurs ont servi avant tout à faire rouler des véhicules plus lourds en sorte que la consommation moyenne peine à se réduire dans des proportions significatives. Il faut bien dire que les lois de la physique imposent des limites infranchissables et que, plus on s’en approche, plus les gains deviennent faibles et coûteux. Je doute fort que l’on puisse réaliser des gains technologiques (solutions “hardware”) aussi fantastiques (-60%) que ceux démontrés par le plan de mobilité de la FSASD (solution “software”).

La recherche de solutions organisationnelles devrait se développer et se diffuser massivement. La logistique, l’organisation de l’entreprise et l’aménagement du territoire (“la bonne activité au bon endroit”) sont autant de domaines dans lesquels il est encore possible d’innover. Malheureusement, beaucoup de nos concitoyens préfèrent se reposer sur les ingénieurs pour nous fournir des solutions clé en main qui n’exigent pas que l’on modifie nos comportements. Dommage, car la voiture propre, bon marché et qui roule à l’énergie renouvelable n’est assurément qu’une chimère…

4 réflexions au sujet de « En matière de mobilité, les solutions “hardware” font rêver. Et les solutions “software” aussi! »

  1. J’abonde plus dans votre sens (d’ailleurs, je consacrerai certainement une note prochaine à  l’exemple de la FSASD – ce qui permet d’ailleurs encore une fois de constater qu’en matière d’écologie, “l’exemple” a une valeur immense), mais je vous encourage, en conséquence, à  ne plus jamais utiliser le mot “voiture propre”.

    Car à  mon sens, l’autre problème essentiel que pose la voiture (au-delà  du mode de propulsion) c’est bien les infrastructures qu’elle demande. On pourrait ainsi parfaitement imaginer ceci (en remplaçant “air comprimé” par n’importe quelle autre technologie soi-disant “propre”):

    Embouteillage urbain de voitures à  air comprimé :
    http://img175.imageshack.us/img175/3653/trafficsucksce3it6.jpg

    Autoroute avec des voitures à  air comprimé :
    http://img508.imageshack.us/img508/1249/embouteillageautoroute1pw8.jpg

    Carambolage de voitures à  air comprimé :
    http://img175.imageshack.us/img175/4535/106393581resizecrop320pjd5.jpg

    Infrastructures routières pour voitures à  air comprimé :
    http://img180.imageshack.us/img180/6681/autoroute10voiesgc9.jpg

    —–

    Dans la même idée, je vous encourage à  faire circuler ce magnifique septuor de peintures de Jà¶rg Muller, peintre suisse qui a bien montré ce qu’avait provoqué l’avènement de la voiture individuelle sur nos campagnes :

    http://sandrominimo.blog.tdg.ch/archive/2008/06/15/pourquoi-la-voiture-propre-n-existera-jamais-bis.html

    (sur la première image il y a déjà  un train, et en tout petit un car postal…)

    Mais aussi cet excellent texte d’André Gorz “L’idéologie sociale de la bagnole” (un peu daté sur certains aspects mais plus que jamais d’actualité sur l’immense majorité du propos).

    Amitiés,

    Sandro

  2. Monsieur le Conseiller d’Etat et Cher Monsieur,

    J’avoue ne pas savoir dans quelle rubrique de votre blog je puis vous faire part de l’idée qui m’est venue ce matin en essayant de “penser utile”. J’ai opté pour la mobilité durable. D’abord je suis un néophyte en la matière, si bien que je “jette” l’idée et si elle retient votre attention, tant mieux. Sur le site internet de l’Etat de Vaud, je ne vois malheureusement pas de statistiques précises concernant le résultat des contrôles radars. Une vague allusion toutefois aux contrôles fixes et mobiles qui nous enseignent qu’il y a eu 49’800’000 contrôles de vitesse tous chiffres confondus (soit 1’500’000 par radars mobiles et 48’300’000 par radars fixes). Sur l’ensemble de ces contrôles, 0,16% se sont révélés positifs. Je ne sais pas ce que cela représente sur le plan “rentrées financières” pour l’Etat de Vaud, mais supposé que les infractions correspondent à  des amendes minimales de Fr. 40.– (alors qu’elles peuvent aller bien au delà ) les 79680 infractions pour excès de vitesse représentent des rentrées de plus de 3 millions de francs. A Fr. 200.– de moyenne, cela représente alors près de Fr. 16 millions. Partant de l’idée (je suis néophyte je vous le rappelle) que les excès de vitesse génèrent selon toute vraisemblance une pollution accrue, il me paraîtrait normal qu’un pourcentage des amendes (disons 10% par ex.) puisse être reversé dans un fonds destiné à  un objectif à  définir mais qui est en relation avec la mobilité durable. le développement durable que sais-je encore. Il y a, j’imagine, des préalables juridiques et politiques à  la matérialisation de cette idée, mais elle aurait pour “vertu” de rendre compatible une amende pour excés de vitesse avec la notion de “pollueur/payeur” et donc d’utiliser une partie de cette amende à  des fins d’écologie. Mais encore faut-il que Pascal Broulis soit d’accord et là  ce n’est pas gagné…..Avec mes sentiments dévoués.

  3. @Sandro Minimo

    Je constate avec plaisir que nous avons les mêmes lectures (Gorz et peut-être Illich). Les dessins de Jà¶rg Mà¼ller m’ont absorbé de longs moments lorsque j’avais 10 ou 12 ans. Je suis très heureux de les redécouvrir sur le web. Bien que féru de nouvelles technologies et foncièrement optimiste, je dois dire que ces images m’ont poussé à  garder une certaine distance critique à  l’égard du Progrès…

    NB: Si je parle de “voiture propre”, c’est par ironie. Un peu comme pour les “frappes chirurgicales” de la guerre US en Irak qui peuvent laisser penser qu’il s’agit de soins médicaux!

  4. @ Philippe Liechti

    Votre calcul estimatif est d’une redoutable précision, puisque le chiffre exact est: 15,9 millions de francs pour 2007 (voir http://www.lematin.ch/fr/actu/suisse/radars-le-nombre-d-amendes-sur-les-autoroutes-a-explose_9-111421).

    Bien sûr je ne serais pas opposé à  l’idée d’affecter tout ou partie de ces recettes aux mesures en faveur des transports publics et du développement durable. Mais, comme le dirait mon collègue Pascal Broulis, les dépenses de l’Etat dans ce domaine excèdent de loin ces montants. Mais si l’efficacité des contrôles était maximale, les recettes chuteraient à  zéro. Faudrait-il alors renoncer aux mesures favorables au développement durable qu’elles permettaient de financer?

    Je crois qu’il faut surtout garder à  l’esprit que le principal bénéfice pour la société vaudoise, c’est la diminution des accidents et des coûts sociaux considérables qui leur sont associés.

    Avec mes meilleures salutations.

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