Réchauffement climatique: l’étonnant consensus

glacier-daletsch.jpg

A l’occasion du “Forum des 100” organisé en 2007 par L’Hebdo, M.I.S. Trend a commenté son étude Sophia sur ce que pensent les leaders et la population du réchauffement climatique et de ses conséquences pour la Suisse (voir http://www.forumdes100.com/2007/05/sondage_rechauf.html). “L’étude Sophia 2007 révèle une forte aspiration à une action déterminée de l’Etat”, analyse Chantal Tauxe dans son éditorial. Depuis lors, les élections fédérales ont eu lieu. Certes les Verts y ont connu une belle progression. Certes Christoph Blocher et l’aile anti-développement durable de l’UDC ont été écartés du pouvoir. Mais on peine à voir l’action déterminée de l’Etat dans ce domaine. On peut rechercher quelques explications à cet immobilisme dans le sondage en question…

Pour 55% des leaders et 38% de la population, l’état de la planète serait la première préoccupation des Suisses (avant l’insécurité, l’emploi et les coûts de la santé). Ce qui n’empêche pas 39% des leaders de droite (largement majoritaires aux Chambres fédérales) de dire que la médiatisation du réchauffement de la planète est exagérée.

Et puis, le problème va se résoudre gr ce au génie humain. C’est en tout cas ce que pensent 67% des leaders et 53% de la population qui ont confiance en la capacité d’adaptation de l’Homme. Les seuls à douter sont les jeunes (55%). Génération “no future”?

Si les leaders de gauche estiment à 58% que l’Homme est principalement responsable du phénomène, ceux du centre et de droite ne partagent cette opinion qu’à respectivement 27% et 24%.

75% des leaders et 71% de la population estiment qu’ils pourraient faire plus d’efforts pour l’environnement. Mais le veulent-ils vraiment? Seuls 12% des leaders et 22% de la population affirme ne pas pouvoir vivre avec 2 degrés de moins dans leur habitation. On se prend à rêver aux économies d’énergies qui seront prochainement réalisées si les autres concrétisent leur engagement!

Globalement, 65% des leaders pensent que les problèmes écologiques ne se résoudront qu’avec des lois contraignantes (58% de la population). Ici aussi, seul un biais d’échantillonnage permet d’expliquer l’écart avec ce que l’on peut observer sous la coupole fédérale. En réalité cette opinion est partagée par 88% des leaders de gauche, mais par 46% seulement de ceux qui se disent à droite.

Etonnamment, 78% des sondés sont d’accord avec l’idée d’interdire les appareils ménagers consommant beaucoup d’énergie. Je crains que les enquêteurs ne leur aient pas fourni la liste des appareils visés et que les personnes interviewées aient répondu en pensant aux appareils de leurs voisins…

A chaque fois que les sondés doivent dire s’ils estiment que leur comportement est favorable à la protection de l’environnement, il en ressort une image plutôt flatteuse. Par exemple, 45% des leaders et 58% de la population affirment renoncer à la voiture pour de petits trajets.

Dans le même ordre d’idée, tout le monde semble disposé à payer des taxes qui n’existent pas encore. 53% des leaders et 45% de la population seraient, par exemple, très favorables à une taxation des véhicules en fonction de la consommation de carburant. En moyenne, une taxe sur le prix du billet d’avion pour un voyage intercontinal pourrait rapporter CHF 186.- chez les leaders et CHF 93.- chez les autres. Les enquêteurs auraient dû encaisser tout de suite!…

La question du nucléaire représente toujours une ligne de fracture entre la gauche et la droite, tout comme entre les leaders et la population. Pour garantir un approvisionnement du pays en électricité, 86% des leaders de droite misent sur le nucléaire, contre 29% chez ceux de gauche et 32% parmi la population.

La conscience diffuse des gaspillages et des efforts tout à fait supportables qui peuvent être faits par chacun conduit tant les leaders (71%) que la population (60%) à considérer qu’une réduction de 50% de notre consommation d’énergie peut se concrétiser sans modification notable du mode de vie. Il n’y a plus qu’à attendre que les ingénieurs fassent leur travail…

D’ailleurs, cela représente une opportunité pour l’économie. C’est une opinion avec laquelle 89% des leaders sont assez ou tout à fait d’accord. Mais seuls 32% en sont vraiment convaincus à droite, contre 72% à gauche.

Enfin, un résultat qui devrait intéresser les tenants de la “décroissance”: seuls 3% des leaders et 7% de la population estiment que la diminution de la consommation d’énergie n’est pas compatible avec la croissance économique.

Voici mon analyse synthétique de cette étude:

  • Le consensus autour du réchauffement climatique est évident, mais les mesures à prendre divisent nettement plus.
  • Une majorité de sondés pense pouvoir en faire plus pour la protection de l’environnement, mais semble préférer la contrainte (avec une préférence pour les avantages fiscaux lorsqu’on est de droite).
  • Avec ferveur, tout le monde croit au Progrès, à la recherche et à la capacité d’innovation de nos entreprises. C’est la raison pour laquelle la croissance n’est pas menacée par la mise en oeuvre du développement durable. “Le beurre, l’argent du beurre et la crémière” reste un excellent programme politique.
  • Une différence très nette appar t entre les leaders de gauche et de droite quant aux mesures à prendre. Mais la majorité sortie des urnes lors des dernières élections fédérales ne correspond certainement pas à la composition de l’échantillon des leaders interrogés dans le cadre de cette étude.

Une réflexion au sujet de « Réchauffement climatique: l’étonnant consensus »

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *