Stratégie routes et vélos: comme sur des rails!

RC1 voiture, bus et vélo

(RC1 à la hauteur de Préverenges; l’espace routier est partagé par les voitures, les bus et les vélos)

Après avoir présenté en septembre 2006 sa stratégie pour le développement des transports publics à l’horizon 2020, le Conseil d’Etat a dévoilé, vendredi 15 octobre 2010, son programme pour l’évolution du réseau des routes cantonales et sa stratégie pour la promotion du vélo. Ces visions, parfaitement complémentaires et coordonnées avec les projets d’agglomérations, lui permettent de mettre en oeuvre, dans les 10 à 15 prochaines années, les principes de mobilité durable et multimodale énoncés dans le Plan directeur cantonal. Ces stratégies marquent la fin des projets décidés au coup par coup et s’inscrivent parfaitement dans la perspective de développement durable du canton et dans l’Agenda 21 cantonal dont les objectifs chiffrés ont été arrêtés aux horizons 2012, 2020 et même 2050. Fort de cette vision cohérente et ambitieuse de la mobilité durable, le Conseil d’Etat peut annoncer des engagements financiers supplémentaires importants (voir le communiqué de presse du 15.10.10). La stratégie de 2006 pour les transports publics est aujourd’hui bien engagée et les premiers résultats concrets sont là: nouveau matériel roulant pour le RER, accords Vaud-Genève pour l’infrastructure CFF, axes forts de transport public du PALM, etc. A l’évidence, le fait de disposer d’une vision claire à long terme permet de mobiliser des moyens et d’enclencher des projets fédérateurs en phase avec le développement (durable) du canton.More...

Le rapport concernant les routes cantonales à l’horizon 2020 met l’accent sur les éléments suivants (voir le rapport sur les routes cantonales à l’horizon 2020, pdf 3,1 Mo):

  • Nouvelle classification des routes (qui n’avait plus été revue depuis les années 1950!) en réseau de base, réseau complémentaire et réseau local. Un standard d’aménagement et d’entretien est adapté à chaque catégorie et au type de trafic auquel elle est soumise, afin d’engager des moyens adéquats, sans luxe inutile.
  • Afin d’assurer à long terme la viabilité du réseau et sur la base d’un diagnostic effectué “mètre par mètre” à l’aide de techniques laser, les budgets (fonctionnement et investissement) seront au moins triplés dès 2010 par rapport à ce qu’ils étaient au début des années 2000. Cela devrait permettre de préserver à long terme la viabilité des quelque 1’600 kilomètres de routes cantonales (RC) dont la valeur de remplacement est évaluée à plus de CHF 4 milliards.
  • L’entretien des routes cantonales sera assuré avec l’exigence de minimiser les impacts sur l’environnement, en particulier gr ce à l’utilisation prioritaire de matériaux de recyclage (revêtements bitumineux, graves de fondation, remblais, etc.).
  • Le monitoring continu du réseau des RC montre que certains tronçons et carrefours enregistrent un nombre trop important d’accidents. Un programme d’assainissement de ces “points noirs” sera prochainement proposé au Grand Conseil. A cette fin, plusieurs crédits d’étude ont d’ores et déjà été soumis à l’approbation de la Commission des finances.
  • Un important programme d’assainissement du bruit le long des routes est d’ores et déjà engagé et, au travers de conventions-programmes, sera cofinancé par la Confédération jusqu’en 2017. Sa mise en oeuvre est bien évidemment coordonnée avec le programme d’entretien des revêtements routiers, les projets d’agglomérations et l’assainissement des “points noirs”.
  • Tout ces projets intégreront bien sûr les mobilités douces (piétons, cyclistes), prioritairement le long des tronçons nécessitant des aménagements et identifiés dans le cadre de la stratégie de promotion du vélo (voir ci-dessous).

En conférence de presse, certains journalistes n’ont pas manqué de me demander comment un écologiste peut revendiquer des moyens accrus en faveur de la route, laissant entendre qu’il pourrait y avoir là une contradiction. Il m’a donc fallu, une fois de plus, rappeler que les bus empruntent aussi le réseau routier et doivent conduire leurs passagers dans les gares dans le respect des horaires et des correspondances si l’on veut que le réseau des transports publics soit réellement compétitif avec la voiture privée. De même, la sécurité des cyclistes et des piétons nécessite des aménagements de l’infrastructure routière, indispensables pour offrir les conditions d’une mobilité durable. Enfin, l’entretien régulier des revêtements routiers et des ouvrages d’art vise à prolonger leur durée de vie, ce qui permet de réduire considérablement les coûts et les matières premières nécessaires à la reconstruction complète d’ouvrages qui auraient été mal entretenus. Les députés verts du Grand Conseil l’ont d’ailleurs parfaitement compris en votant à l’unanimité ces derniers mois les crédits d’entretien des routes présentés par le Département des infrastructures.

La stratégie de promotion du vélo n’est pas sans lien avec la planification du réseau des routes cantonales. Mais, alors qu’il n’est pas prévu d’étendre notablement le réseau routier, les infrastructures nécessaires pour développer l’utilisation du vélo en général doivent être considérablement développées. En effet, avec 3% du total des déplacements effectués en vélo, le canton de Vaud se trouve en queue de classement des cantons suisses pour lesquels ce chiffre s’établit en moyenne à 9%, alors qu’un grand canton comme Berne (très comparable au canton de Vaud aux plans topographique et démographique) affiche un taux de plus de 13%. La stratégie adoptée par le Conseil d’Etat vise donc à tripler les distances parcourues à vélo d’ici une dizaine d’années.

Cette stratégie vélo peut se résumer comme suit (voir rapport stratégie cantonale de promotion du vélo, pdf, 4,3 Mo):

  • Le rapport définit un vaste réseau coordonné de voies cyclables intégrant aussi bien les projets conçus par les agglomérations, les itinéraires de rabattement vers les gares et les grands itinéraires de cyclotourisme cantonaux et nationaux (réseau Suisse Mobile).
  • Afin d’accélérer la réalisation d’itinéraires cyclables dans les agglomérations, le canton s’engage à fournir une contribution de 15-20% en complément des 35-40% du coût des ouvrages financés par la Confédération dans le cadre du fonds d’infrastructure. Il s’agit ici d’aménagements de la voirie et des carrefours, de franchissements (autoroute, voie ferrée, etc.), ainsi que de parkings adaptés. Pour la période 2011-2014, cela représentera une aide complémentaire globale de CHF 13,5 mios.
  • Aux abords des agglomérations et des localités desservies par le chemin de fer, les routes cantonales devraient être aménagées de sorte à sécuriser les déplacements à vélo. A noter que 98% des habitants du canton se trouvent à moins de 5 km (15 minutes à vélo) des gares du trafic régional. La combinaison vélo + train représente ainsi une alternative crédible à la voiture pour une très large partie de la population.
  • L’aménagement de parkings à vélos dans les gares par les entreprises de transport sera aussi soutenu.
  • De manière générale, la signalisation des itinéraires cyclables devrait être améliorée avec l’aide du canton.
  • Le succès des systèmes de vélos en libre service à l’initiative de Lausanne Roule devrait bénéficier d’un soutien accru de la part du canton.
  • La sensibilisation des usagers aux avantages procurés par le vélo (fluidité du trafic, environnement, santé) sera intensifiée. De ce point de vue, l’élaboration de plans de mobilité d’entreprise par un nombre croissant de sociétés et d’administrations constitue un important vecteur de promotion du vélo, de même que l’organisation chaque année, à l’initiative du canton, de la semaine de la mobilité.
  • Enfin, le rapport reconnait un certain déficit en matière de compétences techniques pour l’élaboration dans les communes de projets d’aménagement réellement favorables aux cyclistes. Le canton met donc à leur disposition les connaissances de son Guichet vélo, constitué de deux spécialistes du service des routes et du service de la mobilité. A quoi s’ajoute la disponibilité de la commission cantonale des espaces publics à même de conseiller les communes quant à l’aménagement de routes et de places conviviales et sûres.

Afin de donner une base légale à l’ensemble des mesures de cette politique de promotion du vélo, la loi vaudoise sur les transports publics devra être aménagée et pourrait être rebaptisée loi sur les transports publics et les mobilités douces – ce qui inclurait aussi les sentiers pédestres.

Ainsi, la voie est tracée et nous sommes sur les bons rails. En complément avec la stratégie de développement des transports publics, les stratégies en faveur du réseau routier et des mobilités douces fixent les principes d’action et de financement à même de concrétiser les ambitions du Plan directeur cantonal et de l’Agenda 21, en particulier celui de développer le canton tout en réduisant de 75% (2005) à 65% (2020) la part du trafic individuel motorisé dans l’ensemble des déplacements, en stoppant l’étalement urbain, en améliorant la qualité de vie de l’ensemble des habitants (pollution, bruit, accidents) et en optimisant l’utilisation des deniers publics.

Pour un survol rapide du dossier, voir la présentation du 15.10.10 (pdf, 402 Ko)

5 réflexions au sujet de « Stratégie routes et vélos: comme sur des rails! »

  1. Bonjour,

    C’est très encourageant de voir enfin les autorités aménager nos routes afin d’encourager l’utilisation du vélo. Néanmoins, pour beaucoup de personnes, la conversion au vélo, passera inévitablement par l’achat d’un vélo électrique. Au vu de la topographie du canton cela paraît évident.

    Or pour que cette conversion soit réalisable, il faut impérativement changer la législation sur les cyclomoteurs électriques qui n’est plus du tout adaptée aux défis écologiques qui nous attendent. En effet, les vélos électriques de + de 250W nécessitent une immatriculation ce qui est rédhibitoire pour un particulier comme pour la plupart des importateurs. Au Canada et aux Etats-Unis, la législation considère comme vélo des montures allant jusqu’à  750W.

    Je fais depuis 4 ans un trajet Maison-Gare-Bus-Boulot avec un joli dénivelé comme il y a en a beaucoup pour rejoindre les gares du canton. Avec des moteurs électriques de 250W max, un cycliste, gabarit moyen, peine réellement à  effectuer ses trajets sans transpirer s’il doit s’affranchir d’une petite côte.

  2. certains vélos ont uns sorte de boite à  vitesse à  satellites, couplée au moteur de 250wats. Ce qui fait que les 250wats sont utilisés même à  5km/ dans les montées, sans transpirer. Normalement les 250 wats sont utilisables à  20km/h ce qui fait que en dessous de 10km/h seulement une partie de la puissance est utilisée, si vous avez des trajets en montées ou à  plat, le choix du vélo est différent.

  3. Cher Jean-Philippe,

    Oui, selon le contrôleur, certains vélos privilégient le couple au détriment de la vitesse mais malheureusement avec 250 watts on déplace pas une masse de 100-120 kg sur une vraie côte à  une vitesse raisonnable.

    J’ai eu l’occasion d’essayer des e-bikes aux Etats-Unis (750 watts). La différence est vraiment notable. Avec ces modèles-là , on peut parler d’affranchir des côtes sans transpirer.

    Non, je maintiens, il est urgent de réviser cette législation. D’ailleurs cela ne concerne pas seulement la Suisse mais l’Europe.

  4. Pro Vélo région Lausanne vient de publier un communiqué de presse pour saluer l’adoption de cette stratégie vélo. Je suis bien évidemment très heureux que cette démarche satisfasse les attentes du lobby des cyclistes, lequel a d’ailleurs été consulté pour l’élaboration de cette stratégie. Le canton aura toujours besoin de l’appui compétent des associations d’usagers pour accélérer la mise en oeuvre efficace dans le territoire, auprès des communes et des professionnels. Je les en remercie par avance.

  5. Ping : Promotion du vélo: le fruit était (plus que) mûr | François Marthaler

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