Internet, Benjamin Bayart et l’anonymat

Benjamin_Bayart_FDN

(Source: French Data Network, FDN)

Telle la grenouille qui ne se rend pas compte de l’échauffement du bocal dans lequel elle se trouve, nous nous comportons de manière très inconsciente et naïve à l’égard de l’Internet. Une militante du GULL m’a “balancé” cette vidéo d’une conférence de Benjamin Bayart à Science-Po Paris. Profitant d’un week-end maussade, j’ai pris le temps de visionner la vidéo…J’avoue qu’Internet me fascine… La diffusion d’informations et la communication par-dessus les frontières nationales et même continentales a quelque chose de proprement révolutionnaire!

Avec un langage parfois assez crû, Benjamin Bayart met en garde garde contre une transformation sournoise de l’Internet en un vulgaire Minitel 2.0, concentrant le contrôle et les profits en un nombre très restreint d’opérateurs.

Si génial que soit l’Internet, je dois dire que le possible anonymat des internautes me pose problème, dans la mesure où n’importe quelle personne ou organisation peut utiliser ce fabuleux outil de communication pour diffuser des messages critiques, voire haineux. Tout sauf démocratiques…

Sur ce point, Benjamin Bayart est très précis. Il rappelle Voltaire et son célèbre “je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire”…

A la fin de sa conférence, un étudiant lui pose la question de l’anonymat sur Internet et voici la réponse de Benjamin Bayart:

“Pour moi, il doit y avoir un anonymat possible, de principe, et les gens ne doivent pas avoir besoin d’y recourir. Curieux comme approche… Mais exactement comme dans la vie de tous les jours, je peux, dans la société actuelle, être à 99,999% anonyme et donc épouvantablement difficile à attraper. Certains des gens que je connais, anarcho-gauchistes, opposants à la société actuelle, sont dans ce modèle-là et s’expriment en général sous des faux noms – parfois de fausses identités – et donc sont très difficile à suivre. Ce n’est pas mon cas. C’est important qu’on puisse entrer en résistance! La résistance à l’oppression fait partie des droits de l’Homme. Il est important que sur Internet on puisse être anonyme. Et il est beaucoup plus important qu’on n’ait pas besoin de l’être. Mais il faut bien les deux!”

Pour moi, cette phrase conclusive a une résonance particulière… La réorganisation de l’informatique du Canton de Vaud avait suscité l’a création d’un blog anonyme (www.parole2cafe.net). Les animateurs de ce site anonyme (mais peut-être n’y avait-il qu’un seul protagoniste) ont obtenu le licenciement du chef de service. J’en conserve une grande amertume, mais ce sont les nouvelles règles (non-écrites) de l’Internet qui s’imposent…

Bon week-end!

5 réflexions au sujet de « Internet, Benjamin Bayart et l’anonymat »

  1. Du charabia peut compréhensible votre texte. L’anonymat, le secret etc. ne peuvent servir que la guerre. Si une fois vous êtes victime des Francs Maçons, vous comprendrez pleinement la couardise engendrée par le secret entre maçons. Idem pour l’omerta sicilienne. La civilisation, c’est le contraire de l’anonymat et doit tendre à toute suppression du secret. Sur internet aussi.

  2. Il se trouve que, dans le monde des libristes (les utilisateurs de logiciels libres), on s’exprime généralement sous un pseudonyme. Voir, par exemple, le forum sur http://www.swisslinux.org. J’imagine que c’est pour mieux protéger sa liberté de parole en évitant la censure ou, par exemple, des mesures de rétorsion de la part d’un employeur qui ne partagerait pas les mêmes point de vue.

    Je ne comprends pas vos comparaisons avec la franc-maçonnerie et l’omerta sicilienne. L’expression libre mais anonyme n’a rien à voir avec le secret (l’interdiction de s’exprimer).

  3. je ne comprend pas que l’on prenne un pseudo pour exprimer ses convictions, qu’un auteur utilise un pseudo comme un peintre oui, mais le commun des mortels qui se cache parce qu’il n’a pas le courage de ses opinions ça me dérange et je pense que si l’on a pas le courage de dire les choses en face il vaut mieux se taire.

  4. A titre personnel, je partage votre point de vue et je n’ai jamais publié une opinion de manière anonyme. Mais il faut bien admettre qu’il existe bien des pays et des organisations où la liberté d’expression n’est pas garantie. Se taire revient alors à abdiquer face à la violence ou aux menaces de rétorsion. C’est en ce sens que je me rallie au point de vue de Benjamin Bayart.

  5. Un lecteur de ma page Facebook – sur laquelle les articles de ce blog sont systématiquement repris – me signale que la citation de Voltaire ne serait pas de Voltaire. C’est du moins la thèse défendue par Gilbert Salem dans un billet de blog d’avril 2011.

    Magie de l’Internet, j’ai très rapidement trouvé confirmation de ce fait sur wikipédia.

    Mais quelle déception: Voltaire était l’auteur que j’avais choisi pour mon examen de maturité en 1978. J’ajoute, pour l’anecdote, que mon père était alors président de l’Association des amis de Jean-Jacques Rousseau et que ce choix n’était certainement pas neutre du point de vue de la relation père-fils…

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