H144 ou comment le droit de recours des associations sert les intérêts collectifs

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Après plus de deux ans de procédure auprès du Tribunal administratif (TA) puis du Tribunal fédéral (TF), la H144 – aussi appelée Transchablaisienne – va donc pouvoir se réaliser conformément au tracé défini par l’étude multi-critères conduite par mon prédécesseur vert Philippe Biéler. La décision du TF, et l’octroi d’une subvention fédérale de 43 millions de francs qui en dépendait, fut donc un joli cadeau de Noël (voir le communiqué de presse du Conseil d’Etat vaudois). La résolution de ce dossier apporte, il me semble, un éclairage très intéressant sur le débat en cours aux Chambres fédérales au sujet de l’initiative radicale zurichoise visant à supprimer le droit de recours des associations de protection de l’environnement (voir, par exemple, Domaine Public du 30.12.07).

Le projet de la H144 aura fait l’objet d’études et de variantes durant plus de 50 ans. Finalement, Philippe Biéler a mis en place une procédure de concertation intégrant y compris les organisations de protection de l’environnement pour conduire une analyse multi-critères des diverses solutions possibles. La prise en compte des enjeux environnementaux, très en amont du processus, a conduit les associations écologistes à ne pas faire opposition au projet (bien qu’une nouvelle route ne soit jamais un plus pour l’environnement!).

Ce sont donc les propriétaires privés (principalement les exploitants agricoles touchés) qui ont formé recours en arguant que leurs intérêts particuliers justifiaient que l’on réalise cette liaison routière à travers le Chablais selon un autre tracé (syndrome nimby “not in my back yard” ou “pas dans mon arrière-cour”). Après avoir ordonné une expertise, le TA a confirmé que la prise en compte des intérêts fonciers était équilibrée par rapport aux autres critères, notamment écologiques et économiques.

Que se serait-il passé si le droit de recours des associations de protection de l’environnement n’avait pas pu s’exercer, comme le prévoit l’initiative radicale, en vertu du vote des Grands Conseils vaudois et valaisan? Probablement que le tracé de la H144 aurait suivi la “ligne de moindre résistance”, en évitant les terres cultivées au détriment des zones naturelles. Il se serait forcément trouvé un citoyen sensible aux questions environnementales (ou opposé au projet pour de toutes autres raisons) pour invoquer une violation de la loi sur la protection de l’environnement et obtenir gain de cause au TF. On serait alors reparti pour 50 ans…!

Sachant que l’initiative radicale a pour objectif déclaré de faciliter et d’accélérer la réalisation d’infrastructures publiques, je prétends, à la lumière de cet exemple, que des projets enlevés au forceps et sans prendre en compte sérieusement les intérêts de l’environnement seraient encore plus facilement et fréquemment recalés.

Plutôt que de restreindre la protection de l’environnement, il faut au contraire renforcer la qualité des projets si l’on veut vraiment qu’ils se réalisent. C’est incontestablement le cas de la H144, non seulement au niveau du choix du tracé mais encore au niveau de la qualité paysagère. C’est ainsi que j’ai organisé un concours d’architecture pour les différents ouvrages d’art. Un concours qui a en particulier débouché sur le choix de ce magnifique pont rouge sur le Rhône que je me réjouis très sincèrement d’inaugurer en 2012! (voir aussi le dossier complet sur le site du service des routes)

2 réflexions au sujet de « H144 ou comment le droit de recours des associations sert les intérêts collectifs »

  1. Pour avoir suivi de près ce dossier ainsi que passablement d’autres, je peux affirmer qu’une discussion précoce entre les différents acteurs (y compris les associations de protection de la nature) permet d’améliorer la qualité d’un projet et également de réduire très fortement les procèdures devant les tribunaux. La H144 en est un bon exemple.
    Dans bien des cas, des mesures simples et des discussions ouvertes permettent d’éviter tous les recours (population, associations, etc.) et de réaliser les projets dans des temps records.

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