Indice de réparabilité en Suisse: hâte-toi lentement!

(Source: www.indicereparabilite.fr/appareils/ordinateur-portable)

Dans un article publié le 07.05.2024. la FRC rappelait que la publication d’un indice de réparabilité pour les appareils électriques et électroniques n’était pas obligatoire en Suisse, mais que “certaines entreprises – à l’instar de why! open computing – ont développé un assortiment sur la base de la réparabilité et de la longévité des produits et proposent les pièces pour les réparer” (voir https://www.frc.ch/diminuer-le-lourd-impact-dun-smartphone/). Le 26.06.2024, le quotidien Le Temps publiait un article intitulé “Obsolescence programmée: le Conseil fédéral veut introduire un indice de réparabilité et de durée de vie” et je me suis dit que l’histoire s’accélérait enfin…L’article du Temps se basait sur un communiqué de presse du Conseil fédéral daté du même jour (voir Le Conseil fédéral publie un rapport sur le raccourcissement délibéré de la durée de vie des produits). En conclusion de son communiqué de presse, le Conseil fédéral indique (c’est moi qui souligne en gras): Obliger les fabricants et les vendeurs à communiquer activement sur la durée de vie et la réparabilité en annotant les produits selon un indice permettrait de garantir que ces informations parviennent aux consommateurs. L’initiative parlementaire 20.433 de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national a donné au Conseil fédéral la possibilité d’introduire une telle obligation de déclaration.

J’ai téléchargé le rapport de 6 pages du Conseil fédéral (PDF, 165,9 ko) qui n’est que la réponse au postulat 21.4224 Sanctionner juridiquement le raccourcissement délibéré de la durée de vie d’un produit déposé le 30.09.2021 par la Conseillère nationale verte Florence Brenzikofer.

On y lit deux ou trois choses instructives sur la façon dont le Conseil fédéral considère la problématique de l’obsolescence programmée…

Le Conseil fédéral estime, par exemple, que “réduire intentionnellement, mais en toute transparence, la durée de vie d’un produit ne constitue pas une tromperie” (page 4). En somme, Apple pourrait, par exemple, signaler que la mise à jour de iOS ralentira votre iPhone au point qu’il en deviendra inutilisable (cas réel et déjà démontré). Mais la firme à la pomme n’aura pas besoin de préciser que, sans cette mise à jour, l’appareil ne pourra plus être pleinement utilisé pour exécuter les apps dont vous avez besoin. Sympa!

L’Office fédéral de l’environnement a commandé un rapport au sujet de l’obligation d’indiquer la durée de vie des produits qui lui a été rendu le 29.11.2022, sous le titre “Volkswirtschaftliche Beurteilung (VOBU) über die Einführung verpflichtender
Deklarationen über die Reparierbarkeit und Lebensdauer ausgewählter elektrischer Geräte” (PDF, 1,9 Mo, en allemand uniquement). Le Conseil fédéral semble adhérer aux conclusions de ce rapport, dont cette affirmation qui devrait mettre tout le monde d’accord, de gauche à droite de l’échiquier politique: “Le chiffre d’affaires réalisé sur les réparations et la vente de produits d’occasion devrait augmenter et entraîner une certaine hausse de la valeur ajoutée dans ces domaines. […] Les prix d’achat accrus, du fait notamment des coûts de la réglementation, devraient être compensés par l’allongement de la durée de vie, qui fera baisser les coûts du cycle de vie, si bien que les coûts totaux pour les consommateurs pourraient baisser dans l’ensemble.”

Et le Conseil fédéral de conclure (je bois du petit lait!): “Au cours des dernières décennies, pour diverses raisons, la durée de vie et d’utilisation des appareils électriques n’a cessé de diminuer. Remplacer ce type d’appareils entraîne une plus
forte consommation de matériaux et d’énergie.”

Il va cependant falloir que les consommateurs suisses s’arment d’un peu de patience. Les chambres vont devoir accepter le rapport du Conseil fédéral sur le postulat 21.4224, puis le DETEC devra élaborer un projet d’ordonnance précisant les critères et la procédure de publication de l’indice de réparabilité, mais aussi vérifier que ce dernier soit en cohérence avec la directive adoptée le 20 février 2024 par le Conseil de l’Union européenne visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique, qui doit introduire de nouvelles obligations en ce qui concerne la durabilité, la réparabilité, le greenwashing et l’obsolescence programmée. Ce projet sera alors mis en consultation et possiblement amendé en fonction des réactions (notamment des milieux économiques), avant d’être adopté par le Conseil fédéral avec une date d’entrée en vigueur. En résumé, il ne faut pas s’attendre à un quelconque changement avant 2026 ou 2027.

Ne reste plus qu’à espérer que why! n’ait pas déposé le bilan avant de pouvoir valoriser son avantage comparatif sur le marché des ordinateurs portables…

 

 

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