Les patates de la colère

 

En ces temps de campagne sur le salaire minimum, on parle beaucoup des coûts importants supportés par l’agriculture suisse, et donc ses difficultés à faire face à la concurrence internationale.

Il est effectivement vrai que l’on importe de plus en plus de denrées agricoles que l’on pourrait très bien produire en Suisse (céréales, fruits et légumes, œufs, viande), au détriment de nos paysans, dont le nombre diminue ne cesse de diminuer (plus de 1000 exploitations ont fermé leurs portes rien qu’entre 2011 et 2012).

Il urge donc de venir plus efficacement en aide à nos agriculteurs, dont le travail indispensable n’est souvent pas assez reconnu et soutenu.

Or est-ce vraiment en agissant sur les coûts de production que l’on va sauver ce qui peut encore l’être ?

Rien n’est moins sûr! La taille d’une exploitation moyenne en Suisse est d’un peu plus de 20 hectares  , contre par exemple plus de 55 hectares en France  ou 175 hectares aux Etats Unis , avec toutes les économies d’échelle que cela engendre. Le coût de la main d’oeuvre (parfois exploitée éhontément) et des normes souvent moins strictes en matière de qualité et de protection de l’environnement finissent de rendre les coûts de production agricole de la plupart des pays commerçant avec la Suisse bien plus bas que les nôtres.

Vouloir à tout prix rester compétitifs dans ce domaine voudrait dire baisser drastiquement nos exigences de qualité, voir nos cours d’eau et notre air moins propres, nos sols plus pollués, et nos agriculteurs pas plus riches. Le tout, sans forcément réussir à égaler les prix pratiqués par nos voisins européens.

Et si on prenait le problème autrement, et qu’on se disait que nos paysans n’ont pas à subir cette concurrence déloyale ? Pourquoi ne pas exiger des produits que nous importons les mêmes standards de qualité et de respect de l’environnement  que nous imposons aux producteurs suisses ?

C’est justement ce que proposent les Verts suisses avec l’initiative ” Pour des denrées alimentaires de qualité”, dont la récolte de signatures devrait débuter dans quelques semaines.

Très concrètement, l’initiative aura des répercussions sur 5 grands domaines :

  1. bien-être des animaux : les prescriptions suisses en matière de protection des animaux doivent également s’appliquer aux produits importés, qui ne pourront plus provenir d’élevages intensifs.
  2. protection de l’environnement : l’initiative demande une amélioration des standards en vigueur, une production économe en ressources et occasionnant peu de transport.
  3. qualité des produits : les denrées alimentaires doivent être plus naturelles et plus saines, ce qui implique notamment de produire les composants des aliments transformés de manière écologique et dans le respect des animaux.
  4. proximité consommateur-producteur : l’initiative entend renforcer la commercialisation et la transformation de produits régionaux.
  5. conditions de travail équitables : l’initiative vise à encourager le commerce équitable.

Avec cette initiative, sur laquelle vous trouverez plus d’infos ici, c’est un paradigme qui change. Plutôt que de faire de la moins bonne qualité pour moins cher, essayons de garder sur nos tables des produits de proximité et de bonne qualité.

C’est à mon sens là que se trouve une bonne partie de la solution pour une agriculture suisse permettant aux producteurs de vivre dignement de leur travail et de payer convenablement leurs employés.

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