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Parce que nous n’avons qu’une seule Terre…

Dans quelques semaines nous serons appelés à voter sur l’initiative “Pour une économie verte”. Voici quelques réflexions à ce sujet…

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« Nous devons utiliser nos ressources de manière mesurée et parcimonieuse ». Voilà une phrase que l’on entend souvent dans le cadre de discussions sur les finances publiques.

Notre économie vit pourtant à crédit depuis des années, consommant bien plus de ressources que notre planète ne peut en régénérer sur un même laps de temps, sans que cela n’émeuve les tenants de la rigueur budgétaire.

Les conséquences à terme pour notre économie, notre société et plus généralement le monde dans lequel nous vivons sont bien plus graves qu’un dépassement de crédit.

Car aujourd’hui, le constat est sans appel : l’empreinte écologique de notre pays, c’est-à-dire l’impact que nous avons sur nos ressources naturelles, équivaut à trois planètes.

Nous n’en avons pourtant qu’une, et nous vivons donc au détriment de nos enfants et de nos petits-enfants, hypothéquant ainsi leur prospérité et leur bien-être.

Il est urgent d’agir si nous ne voulons pas nous retrouver telle la cigale de la fable de La Fontaine à la fin de l’été.

Car la solution existe. Elle est à portée de main.

L’initiative « pour une économie verte » lancée en 2011 et soutenue par une large alliance de partis politiques et d’associations économiques, de consommateurs et environnementales, en est la preuve.

Le texte qui sera soumis au peuple le 25 septembre prochain demande que notre empreinte écologique soit ramenée à une planète d’ici à 2050, via des mesures essentiellement incitatives visant à réduire le gaspillage et rendre nos moyens de production plus efficaces et économes.

Le Conseil Fédéral et le Parlement pourront, si le peuple l’accepte, définir puis mettre en place progressivement des mesures allant dans ce sens : par exemple des encouragements à l’innovation et aux produits durables, la création de nouvelles filières de recyclage, ou encore la promotion de standards écologiques pour certains produits importés à fort impact, comme l’huile de palme.

Producteurs et consommateurs en sortiront gagnants. Les premiers car ils assureront leur viabilité sur le long terme, les seconds car ils auront à disposition des produits de meilleure qualité, à la durée de vie plus longue et produits localement.

Malgré tout cela, Economiesuisse a décidé de se battre contre l’initiative à coup de clichés éculés, montrant qu’elle représente une vision de l’économie appartenant au passé, et qu’elle est prête à sacrifier notre prospérité sur le long terme par pur dogmatisme.

Plutôt qu’avancer des arguments mensongers et caricaturaux, cette association ferait mieux d’encourager le virage vers la durabilité qu’ont déjà entrepris de nombreux autres pays.

Ceux-là auront sinon bon jeu de nous dire « eh bien dansez maintenant » quand soufflera la bise de l’épuisement des ressources.

UNE INITIATIVE QUI A LE GOÛT DE BOUCHON

 

 

Toute personne écoutant de temps en temps la radio partagera ce constat : les annonces de bouchons sur les routes et autoroutes suisses sont toujours plus nombreuses, et il est presque impossible d’écouter un « inforoute » le matin ou en fin d’après-midi sans entendre parler d’importantes surcharges de trafic aux alentours des agglomérations, mais aussi de plus en plus dans des zones périurbaines, voire rurales.

Partant de ce constat, le lobby routier « AutoSuisse », appuyé par quelques politiciens bourgeois, a lancé une initiative au nom trompeur : « pour un financement équitable des transports ». Avec ce texte, les initiants souhaitent affecter l’entier des recettes provenant de l’impôt sur les carburants à la construction routière, alors qu’aujourd’hui seule la moitié de la somme collectée est dédiée à cette tâche, le reste finissant dans le « pot commun » de la Confédération.

À nous les autoroutes à six voies, les routes de contournement à foison, et donc le rêve américain et la fin des bouchons ?

Eh bien figurez vous que non !

De très nombreuses études et exemples piochés de par le Monde montrent qu’augmenter la capacité routière ne fait à terme qu’augmenter le nombre de voitures en circulation, et donc le trafic. Quelques mois ou années plus tard, on se retrouve donc avec tout autant, si ce n’est plus de bouchons. Cet état de fait a été modélisé par un mathématicien allemand qui lui a donné son nom : « Le paradoxe de Braess ». L’exemple le plus parlant est sans doute celui de la « Katy Freeway », plus grande autoroute du Monde, servant de contournement à la ville texane de Huston. Afin de venir à bout des bouchons, les autorités ont décidé d’agrandir cette autoroute, la portant à 26 (oui, vous lisez bien, 26) voies. Inaugurée en 2008, elle est aujourd’hui totalement saturée, avec des embouteillages plus longs qu’auparavant.

Pourquoi donc ? Tout simplement car en construisant de nouvelles routes on incite les gens à prendre leur voiture, à délaisser les transports en commun et à s’installer toujours plus loin de leur lieu de travail. C’est donc un peu l’histoire du serpent qui se mord la queue…

Pour venir à bout du trafic routier, il faut proposer des alternatives aux automobilistes : améliorer les transports en commun et les garder à des prix abordables, développer le télétravail et les horaires cadencés, densifier les centres urbains pour permettre à qui le souhaite d’habiter plus près de son lieu de travail etc. Il n’y a bien entendu pas de solution miracle, mais tout un tas de mesures à mettre en place, et qui combinées portent leurs fruits. L’inauguration du métro M2 à Lausanne a ainsi permis de faire baisser légèrement le trafic au centre ville de Lausanne, alors que la population locale a fortement augmenté ces dernières années. Pourquoi prendre sa voiture pour aller de Ouchy à la gare, quand on y est en 5 minutes en métro ?

Tout cela sans compter que l’on continue à investir des sommes importantes en Suisse pour l’amélioration du réseau routier. Personne ne nie en effet l’utilité de la voiture, notamment pour les habitants de zones moins bien desservies par les transports en commun. Cantons, communes et Confédération investissent ainsi chaque année des milliards de francs pour rénover et élargir les routes existantes, et en construire de nouvelles. Depuis 1950, il n’y a eu qu’une seule année, 2005, où les transports publics ont reçu davantage d’argent que la route.

Le milliard et demi de francs qui en cas d’acceptation de l’initiative  sera retiré chaque année du budget de la Confédération pour financer le goudronnage de terres agricoles va cruellement manquer pour financer d’autres secteurs. Le Département Fédéral des Finances prévoit ainsi des coupes de 350 millions dans la formation et recherche, 250 millions en mois pour les transports publics, 200 millions en moins pour l’agriculture ou encore 150 millions en moins pour l’aide au développement.

Veut-on donc des routes plus grandes mais tout aussi engorgées, avec moins d’argent pour des secteurs essentiels à notre qualité de vie ?

C’est à cette question qu’il faut répondre le 5 juin prochain. Pour ma part, ce sera résolument NON !

 

Merci Luc

 

Triste dimanche que celui que nous venons de vivre.

Au delà de la  déception pour la perte du siège vert au Conseil des États et l’inquiétude face au virage à droite qui se confirme au niveau cantonal, c’est un profond sentiment d’injustice qui m’habite.

S’il est un politicien qui ne méritait pas de subir une non réélection, c’est bien Luc Recordon, un homme qui aura profondément marqué la politique cantonale et fédérale de ces 20 dernières années.

Luc Recordon, c’est un animal politique, un politicien au parcours impressionnant : Municipal à Jouxten-Mezery, député au grand Conseil, co-président des Verts vaudois, élu au Conseil national en 2003, et 2ème écologiste (après Robert Cramer, élu 3 semaines plus tôt) à siéger à la Chambre des cantons.

En 12 ans à Berne, il aura déposé plus de 180 interpellations, postulats, questions ou motions, noué des alliances, défendu des thématiques aussi diverses qu’importantes, telles que le tournant énergétique, la réforme de l’armée, la politique agricole ou encore le financement des grandes infrastructures ferroviaires.

Au delà du Luc Recordon politicien influent, c’est l’homme qui épate et impressionne. Pour arriver à un tel niveau en politique, on a coutume de dire qu’il faut être un peu un requin, jouer des coudes plus fort que ses adversaires pour se tailler une place au soleil.

Luc Recordon est sans nul doute l’une des exceptions qui confirment la règle.

Il a toujours brillé par sa modestie, son humanité et sa gentillesse. Il a beau tutoyer des Conseillers fédéraux, il a toujours participé activement aux séances de sa section locale, participé à des fêtes villageoises, écouté et compris tout le monde,  indépendamment du statut, de l’âge ou du niveau social.

Luc Recordon, c’est quelqu’un qui peut être autant à l’aise dans une commission parlementaire que dans un bistrot du Gros-de-Vaud, qui peut siéger le matin au Conseil de l’Europe et participer le soir à une séance de la section Gros-de-Vaud des Verts vaudois, dans la cuisine d’un-e militant-e.

Luc Recordon, c’est celui qui ne s’énerve jamais, qui reste grand seigneur même quand il est attaqué de la manière la plus basse et mesquine (on l’a vu ces dernières semaines), qui reste toujours optimiste et fédérateur.

Luc Recordon, c’est un modèle, probablement la personne qui m’aura le plus marqué depuis que je me suis engagé chez les Verts vaudois, il y a de cela 10 ans.

Luc Recordon, c’est un grand Monsieur de la politique vaudoise, et si un rideau se baisse aujourd’hui sur une partie de sa carrière politique, aucun doute que d’autres vont se lever, et que son engagement en faveur du bien commun continuera sous d’autres formes. Les Verts et surtout notre canton ont trop besoin de lui !

Alors MERCI Luc, et tout le meilleur pour la suite de ton incroyable parcours !

 

Le poulet polonais

 

Contrairement à ce que pourrait suggérer le titre, je ne veux pas vous parler d’une série policière se déroulant à Varsovie, mais d’une expérience récemment vécue, en lien avec notre alimentation et agriculture.

Je rentre d’une semaine de formation pour mon service civil, qui s’est tenue à Schwarzemburg, commune agricole du canton de Berne.

Dans le centre de formation dans lequel logent les civilistes se trouve une cantine. Au menu deux fois par jour un plat végétarien et un autre avec viande. Durant les 5 journées de mon séjour, ce dernier était composé à 2 reprises de poulet provenant de Pologne.

Pas de quoi en faire un article de blog me direz-vous… Et pourtant je crois bien que oui.

J’ai en effet de la peine à concevoir que dans un centre géré par la Confédération on serve de la viande provenant de l’autre bout de l’Europe, alors que cette même Confédération verse des milliards de francs de subsides à l’agriculture, et qu’à moins de 500 mètres du centre de formation se trouve une ferme avicole élevant des poulets selon une méthode “bio”.

Bien sûr, on me dira que la cafétéria est gérée par une entreprise privée, et pas directement par la Confédération, que les prix des menus sont calculés au plus juste et demandent donc des produits bon marché, qu’il existe une liberté de commerce etc.

Il n’en reste pas moins que quelque chose ne tourne pas rond. Notre agriculture se meurt à petit feu ( des centaines d’exploitations mettent la clef sous le paillasson chaque année) et ne survit que grâce à des subventions, et le même organisme qui la subventionne va s’approvisionner en viande à l’étranger.

La viabilité de notre agriculture passe par une consommation locale avec le moins d’intermédiaires possible, avec des consommateurs qui entrent directement en contact avec les producteurs, se rendant compte des conditions dans lesquels sont cultivés ou élevés les aliments qu’ils consomment.

Les pouvoirs publics devraient avoir une mission d’exemplarité en la matière. Certains, comme la ville de Lausanne  jouent clairement ce rôle. D’autres, comme apparemment le centre de formation de la Confédération à Schwarzenburg, pas encore.

Les élus communaux, cantonaux et fédéraux peuvent les inciter à franchir le pas en déposant des objets parlementaires. Les Verts l’ont fait à Renens il y a quelques mois. J’espère que bien d’autres leur emboîteront le pas !

Cachez ces initiatives que je ne saurais signer

 

En ce dimanche de votations qui voit deux initiatives supplémentaires mordre la poussière, il y a fort à parier que des voix vont de nouveau s’élever contre la prolifération de ces textes.

On nous dira qu’on vote trop souvent, que les partis ont dénaturé cet outil démocratique, qu’il faut augmenter le nombre de signatures, réduire les délais etc.

Pourtant, les initiatives restent d’excellents outils à disposition de qui n’est pas en mesure d’obtenir une majorité parlementaire.
Un exemple tiré de l’actualité récente permet d’illustrer ce propos :

La Confédération a publié il y a 3 jours les chiffres relatifs à la consommation d’essence et aux émissions de CO2 des voitures neuves immatriculées en Suisse en 2014. On constate une baisse de 2,1% des émissions moyennes de CO2. Cette tendance réjouissante est destinée à se poursuivre, puisque les prescriptions sur les émissions de CO2 entrées en vigueur en 2012 fixent des émissions moyennes de 130 grammes de CO2 par Km pour 2015 (contre 142 grammes en moyenne en 2014).

Or qui est à la base de cette prescription fédérale ? Et bien figurez vous que c’est une initiative pourtant taxée d’extrémiste et nuisible, celle “pour une mobilité respectueuse des personnes” lancée  par les Jeunes Vert-e-s en 2008.

Cette initiative, qui demandait en très résumé d’interdire l’immatriculation de nouveaux véhicules trop polluants ou dangereux pour les autres usagers de la route, aurait sans doute eu de la peine à rallier une majorité du peuple et des cantons. Elle a cependant fait assez peur à une majorité de parlementaires fédéraux pour que ceux-ci décident de lui soumettre un contre-projet indirect, instaurant des objectifs contraignants en matière de réduction des émissions de CO2 pour les véhicules neufs .

Il est très probable que sans le spectre de cette initiative, les Verts et leurs alliés auraient été bien seuls sous la Coupole à défendre ces mesures.

Il existe bien entendu d’autres exemples de ce type, comme par exemple l’initiative sur le paysage, qui a grandement contribué à l’ambitieuse révision de la Loi sur l’aménagement du territoire acceptée par le peuple en mars 2013.

De là à dire qu’une bonne initiative est celle que les initiants retirent avant le vote il y a un pas que je ne franchirai pas.

Il y a en effet des cas où le Parlement ne juge pas nécessaire de préparer un contre-projet, ou soumet une version ne répondant pas aux préoccupations de celles et ceux qui ont lancé l’initiative. Dans ce cas, autant aller jusqu’au bout, même si les chances de victoires dans les urnes sont faibles.

Une campagne de votation permet de créer le débat, de susciter la discussion sur des thématiques soudain portées au centre de l’attention médiatique et populaire. À quelques rares exceptions près (je pense par exemple à l’initiative des Vert’Libéraux sur la TVA, qui a durablement plombé le débat sur la fiscalité écologique), les initiatives – mêmes perdantes- font avancer les choses. Elles poussent les opposants à faire des promesses, à annoncer réformes ou nouvelles manières de faire, à tenir en considération l’avis de la minorité favorable au projet.

Ce n’est d’ailleurs pas parce qu’une cause échoue dans les urnes qu’elle n’est pas juste. Le droit de vote des femmes, refusé plusieurs fois (dont la dernière en 1959) avant d’être accepté en 1971, en est une preuve tangible.

Alors non, il n’y a pas trop d’initiatives en Suisse. Nous avons quatre fois par année la chance d’avoir des débats de société sur des thèmes aussi divers que (presque toujours) passionnants, et nous serions bêtes de nous en priver !

 

 

 

Point Godwin atteint

 

Il y a quelques jours, un parlementaire romand publiait sur son blog hébergé par un célèbre hebdomadaire de la place un article dans lequel il relate une discussion qu’il aurait eu avec un fonctionnaire fédéral.

Les propos peuvent être résumés de la sorte : L’UDC est en train de se transformer en parti fasciste, et si cela continue, la Suisse deviendra dans quelques années une dictature, dominée par un “führer” (le terme est vraiment utilisé dans l’article) qui imposera ses idées à un peuple soumis.

Alors bon, j’ai beau ne pas spécialement aimer les méthodes de l’UDC, notamment dans les campagnes électorales et les votations, et n’être d’accord avec à peu près aucun point de leur programme électoral fédéral(qui nie le réchauffement climatique, soutient à fond le nucléaire, prône un repli identitaire et le tout à la bagnole), mais je pense qu’il faut quand même pas déconner !

L’UDC est un parti politique tout autant attaché à notre système démocratique que les autres partis représentés dans les parlements cantonaux et fédéral.

S’il a joué sur les peurs et les frustrations d’une partie de la population de notre pays, via des campagnes électorales au goût pour le moins douteux et aux propos parfois choquants , il n’a jamais franchi les limites imposées par la Constitution, auquel il est je crois pouvoir dire tout autant attaché que les autres forces politiques.

Par respect pour celles et ceux qui ont vécu ou vivent dans des systèmes totalitaires, des termes tels que “fasciste”, “caudillo”, “Führer”, “Conducator” etc. devraient être employés avec retenue, uniquement quand cela est nécessaire.

L’UDC n’a jamais dépassé la barre des 30% de voix au niveau fédéral, et rien ne porte à croire qu’il le fera un jour, vu que son potentiel électoral est estimé à maximum 40% de l’électorat (personnes qui votent ou qui pourraient envisager voter pour ce parti). Les échecs à répétition de l’ancien parti agrarien dans les élections à la majoritaire (que ce soit pour le Conseil des États ou dans des exécutifs communaux ou cantonaux) montrent par ailleurs que le parti crispe fortement une majorité des électrices et électeurs.

Il semble dès lors assez peu probable de voir une dictature s’installer par la voie des urnes… Et quand bien même l’UDC obtenait plus de 50% des voix, il ne s’agirait pas forcément du début d’une longue période de dictature. Dans de nombreux pays démocratiques le système électoral octroie une majorité de sièges à un seul parti, sans que cela n’amène au despotisme et à la répression des autres forces politiques.

La confrontation avec l’UDC doit avoir lieu – comme pour tout autre parti politique –  sur le terrain des idées, lors de débats, dans les parlements, les médias,  à l’occasion de campagnes électorales ou de votations, comme cela se fait dans une démocratie parlementaire.

Crier “vous gagnez et faites progresser vos idées parce que vous êtes de méchants fachos” ne va pas de nous mener bien loin, et risque au contraire de susciter une vague de sympathie pour un parti qui adore par ailleurs jouer les martyrs…

 

Libéraliser les saucisses à rôtir?

 

« Légalisons les saucisses à rôtir ». C’est par ce slogan aux accents un brin surréalistes et volontairement ridicules que les partisans de la modification de la Loi fédérale sur le travail (LTr) soumise au peuple le 22 septembre prochain comptent convaincre la population.

Leur stratégie est en effet simple : faire passer ce changement législatif pour quelque chose d’anodin et logique, mettant fin à une absurdité bureaucratique qui veut que certains produits puissent être vendus 24 heures sur 24 dans les magasins des stations-services, alors que d’autres se voient retirés des étals entre 01h00 et 05h00 du matin.

Or vous imaginez bien que si l’ « alliance pour le dimanche », composée des syndicats, des partis de gauche et des Églises a récolté en un temps record les 50’000 signatures nécessaires pour un référendum, les choses ne sont pas si simples.

Actuellement, les stations-service peuvent occuper leur personnel sans autorisation spéciale 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour vendre de l’essence, mais doivent respecter les horaires de travail réguliers en ce qui concerne leurs magasins ou « shops ».  Des exceptions sont faites pour ceux situés sur les aires d’autoroute ou le long d’axes de circulation importants à forte fréquentation touristique, qui peuvent vendre des produits frais jusqu’à 1 heure du matin ainsi que le dimanche.

Les modifications sur lesquelles nous sommes appelé-e-s à nous prononcer veulent permettre à ces stations-service situées sur les grands axes ou le long d’autoroutes d’employer des travailleurs sans autorisation préalable la nuit et le dimanche. La question n’est donc pas tant de savoir si tel ou tel produit peut être vendu à 3 heures du matin, comme aimeraient le faire croire les partisans de la réforme, mais bien si des personnes doivent travailler de nuit pour les vendre, sans aucune restriction. Quand on connait les conditions de travail peu enviables du personnel de vente, la réponse semble vite trouvée. Ce d’autant plus que le critère de « forte fréquentation touristique » disparait dans la nouvelle mouture de la LTr, ouvrant la porte à une forte augmentation du nombre d’établissements pouvant appliquer le travail 24 heures sur 24…

Voter NON le 22 septembre prochain c’est donc s’opposer à une péjoration des conditions de travail dans le secteur déjà difficile de la vente de détail, au consumérisme toujours plus présent dans notre société (qui a réellement besoin d’acheter cette fameuse saucisse à rôtir à 3 heures du matin ?) mais aussi et surtout donner un signal clair à celles et ceux qui souhaitent libéraliser toujours d’avantage les horaires de travail. Les objets parlementaires sont en effet légion en la matière (élargissement des horaires d’ouverture des magasins etc.) et nul doute qu’un refus net du peuple fin septembre serait de nature à compromettre leur développement.