Dessin de François Maret
Souvenez vous : Il y a quelques semaines, alors que la campagne pour les votations du 25 septembre battait son plein, les défenseurs de la loi sur le renseignement n’avaient cesse d’affirmer que non, notre pays n’était pas à l’abri d’une attaque terroriste.
Cette menace d’après eux toujours plus concrète était même l’une des principales raisons invoquées pour doter nos services de renseignements de nouveaux pouvoirs et moyens d’action.
Aujourd’hui la LRens est sous toit, approuvée par une confortable majorité de votant-e-s, et c’est de nucléaire dont il est question dans les débats politiques, en vue de la votation du 27 novembre.
Du coup, les alarmistes de hier sont devenus beaucoup plus prudents et confiants, et s’excitent même comme de jeunes ratons laveurs enragés lorsque les partisans d’une sortie planifiée du nucléaire osent dire que oui, une centrale nucléaire pourrait un jour faire l’objet d’une attaque terroriste, et que les conséquences pour le pays seraient désastreuses.
Bastien Girod, conseiller national Vert zurichois, en a fait les frais récemment. Suite à une émission de la télé publique alémanique, où il était question d’un avion pouvant s’écraser sur un stade rempli de supporters, M. Girod a publié une vidéo dans laquelle il s’interrogeait sur les conséquences d’un même acte perpétré contre une centrale.
Il n’en a pas fallu plus pour que se lèvent les voix de toutes celles et ceux qui ont plus à cœur leur porte monnaie que notre sécurité et celle des générations futures. L’Union Suisse des Arts et Métiers a notamment été particulièrement virulente, véhiculant propos offensants et calomnieux sur les réseaux sociaux à l’encontre du conseiller national Vert.
Il faut savoir les gars ! Soit il y a un risque – même tout petit, minuscule – d’attentat dans ce pays, et alors une centrale nucléaire serait une cible toute trouvée, avec des dégâts incalculables à la clef, soit il n’y en a pas, et alors vous avez menti éhontément durant toute la campagne sur la LRens.
Au-delà de ces contradictions, se pose la question de la manière dont nous voulons construire les débats d’idées dans ce pays. Les votations nous offrent des occasions uniques d’entamer des réflexions sociétales très intéressantes, et à priori constructives. Elles permettent à des avis différents de se confronter, et au peuple de trancher au final.
Cela pour autant bien entendu que ce soient des idées que l’on oppose. Le problème est que de plus en plus souvent, on se limite à raconter n’importe quoi, si possible en criant avec toute la force et l’arrogance dont on dispose, afin de discréditer complètement celles et ceux qui défendent un avis contraire.
La campagne sur l’économie verte a été en la matière un cas d’école. Au lieu d’argumenter sur le texte de l’initiative et les propositions concrètes des initiants, Economiesuisse a préféré hurler partout que c’était de la folie verte, que les douches allaient être interdites et qu’on retournerait à l’âge de pierre. Pas un mot ou presque sur le texte de l’initiative, ou sur les réelles conséquences de cette dernière.
La campagne au sujet de l’initiative pour une sortie planifiée du nucléaire risque quant à elle de battre des records en matière de bobards gros comme une maison racontés la bouche en cœur par qui s’oppose par principe à toute durabilité.
De là à voir les prémices d’une “trumpisation” de la politique suisse il y a un pas qu’il me semble pour l’heure excessif de franchir. Mais il serait grand temps que quelqu’un – le Conseil Fédéral à tout hasard – siffle la fin de la récréation et pose des règles claires en matière de débat démocratique !
Beeen oui, certains sont lassants de contradictions. Un coup “j’veux parce que ça m’arrange”, un coup “j’veux plus parce que ça m’arrange pas”. Il est bien clair qu’une attaque contre une centrale serait la pire qui pourrait exister. Sans parler de l’héritage que l’on laisse aux générations futures dans le cas où attaque il n’y aurait pas. C’est un peu le syndrome du “après moi le déluge” et celui-ci relève du syndrome d'”irresponsabilité chronique”. Je me demande si un jour les humains deviendront adultes et sortiront de cette adolescence qui leur fait croire qu’ils sont les rois du Monde et qu’ils peuvent tout.